On reproche parfois aux jeux vidéo de ne pas sortir des sentiers battus, mais si vous cherchez une expérience qui ne ressemble vraiment à rien d’autre, il suffit de jeter un coup d’œil du côté de RIOT: Civil Unrest, et son étrange simulateur d’émeutes.
Printemps arabe, Gilets jaunes, Haïti. Depuis quelques années, on a l’impression que le peuple en colère descend de plus en plus souvent dans les rues de la planète afin de faire connaître son mécontentement envers les dirigeants agissant en despotes ou les corporations prenant des décisions qui vont à l’encontre du bien commun. Lors d’une manifestation contre l’implantation d’une liaison ferroviaire transalpine dans le nord de l’Italie à l’été 2011, Leonard Menchiari fût frappé par la violence des affrontements entre les protestataires et les forces de l’ordre, et c’est dans le but de partager l’une des expériences les plus puissantes qu’il ait vécu qu’il a décidé, avec une petite équipe de développeurs indépendants, de créer RIOT: Civil Unrest.
À la base, RIOT: Civil Unrest propose une expérience de gestion de foule des plus inusitée. Dans un souci de montrer les deux côtés de la médaille, le jeu permet d’incarner les manifestants ou les policiers à tour de rôle. La campagne contient une trentaine de scénarios, inspirés de manifestations « célèbres », comme celle de la place Tahrir en Égypte qui fît tomber le régime de Hosni Moubarak, celle de Keratea en Grèce contre la construction d’un dépotoir à proximité des maisons, ou encore les nombreuses protestations du mouvement des Indignados en Espagne. On compte également un mode « Global », où l’on peut définir les paramètres de sa partie, et un mode « Contre », permettant de se mesurer à d’autres joueurs en ligne.
Si l’on ne peut questionner sa conscience sociale, RIOT: Civil Unrest s’avère cependant un peu décevant en termes de mécaniques. Les objectifs sont simples (protéger les tentes d’un campement temporaire, empêcher les manifestants de pénétrer à l’intérieur d’un périmètre, etc.), mais peu importe de quel côté de la loi on se trouve, on ne contrôle pas vraiment les mouvements de foule: on pointe plutôt la direction où l’on voudrait que les gens se déplacent à l’aide du bâton analogique de la manette. On a aussi accès à quelques items (mégaphone, cocktails Molotov, poivre de Cayenne, etc.) pour fouetter l’ardeur des troupes ou modérer leur ardeur, et c’est à peu près tout. Rarement a-t-on vu un jeu de stratégie aussi minimaliste.
RIOT: Civil Unrest s’adresse à un public averti, et l’expérience présente son lot d’images choquantes, comme un policier abattant froidement un manifestant qui n’est pas armé, mais l’esthétique du titre, avec ses graphiques s’inscrivant dans la plus pure tradition du « pixel art », atténue quelque peu la violence du propos par son look de vieux jeu d’arcade. L’interface n’est pas particulièrement élégante, et l’écran, très chargé, est parfois à la limite du fouillis, avec la foule de manifestants, les escouades policières, et les nombreuses informations qui s’y affichent. Consistant en une sorte de bruit de fond de foule incessant, l’ambiance sonore finit rapidement par devenir désagréable, assez pour écourter les sessions.
On ne peut certes pas reprocher à un développeur de créer un titre qui possède une conscience sociale, mais malheureusement, malgré toutes ses bonnes intentions, force est d’avouer que RIOT: Civil Unrest est beaucoup plus proche de l’expérimentation que du jeu.
RIOT: Civil Unrest
Développeur : IVP Productions / Leonard Menchiari
Éditeur : Merge Games
Plateformes : Nintendo Switch, PC, PS4 et Xbox One (testé sur Xbox One)
Jeu disponible en français (texte à l’écran seulement)
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