Mettant en vedette un félin doté de parole qui n’a pas peur de dire leurs quatre vérités aux humains, Petit panier aux amandes, le huitième tome de la série Le Chat du Rabbin, continue de se moquer avec aplomb de la religion.
Élevée dans le catholicisme, Aline aime Roger, mais ne voulant pas briser l’harmonie qui règne entre son amoureux et sa famille juive, elle prend la décision de se convertir au judaïsme. La jeune femme va consulter un Rabbin, mais ce dernier ne comprend pas pourquoi quelqu’un de sensé voudrait s’embarrasser d’une religion aussi compliquée que la sienne avec ses six-cent-treize commandements, et refuse sec de la convertir. Aline fait donc appel à Zlabya, la fille d’un autre Rabbin, pour lui enseigner la Torah, et au fil des leçons, elle fera la connaissance de son chat, un félin capable de parler qui tentera de la décourager en soulignant le côté ridicule et arbitraire de toutes ces règles religieuses…
Inspirée par Imhotep, un matou oriental qui a fait partie de la famille du bédéiste Joann Sfar durant dix-huit ans (et dont on peut voir la photo au début de l’album), le coup de génie du Chat du Rabbin est d’utiliser un animal parlant à la manière d’un fou du roi pour se moquer affectueusement de la religion, et de ses multiples contradictions. Sous le biais de l’humour, l’auteur aborde des questions théologiques complexes, et bien s’il s’agisse du huitième livre d’une série en cours, l’histoire de Petit panier aux amandes est entièrement autonome. Il n’est donc pas nécessaire d’avoir lu les tomes précédents pour apprécier cette fable irrévérencieuse sur la religion en général, et le judaïsme en particulier.
Se définissant comme un adepte du « trait vivant jeté sur le papier », l’approche graphique de Joann Sfar consiste à ne pas gâcher l’énergie du moment en essayant de faire un « beau dessin » et de rester le plus près possible de l’inspiration initiale. Pris séparément, les éléments individuels de ses illustrations sont donc assez sommaires (et pas toujours anatomiquement corrects), mais étonnamment, l’ensemble produit un très beau résultat, dont le cachet artisanal est renforcé par des cases bancales tracées à la main. Avec une touche de nostalgie et de poésie, Sfar reproduit les beautés de la ville d’Alger dans les années 1920, et ses planches sont superbement mises en valeur par la coloration de Brigitte Findakly.
Il n’est pas évident de se moquer de la religion sans écorcher les sensibilités, mais c’est pourtant ce que fait Petit panier aux amandes avec sa dissertation iconoclaste sur l’engagement, qu’il soit amoureux ou religieux.
Le Chat du Rabbin Tome 8 : Petit panier aux amandes, de Joann Sfar. Publié aux Éditions Dargaud, 60 pages
4 commentaires
Pingback: Critique Le Chat du Rabbin Tome 8 : Petit panier aux amandes - Patrick Robert
Pingback: Macbeth à la sauce Jo Nesbo, un drame modernisé
Pingback: Atom Agency: les plaisirs démodés
Pingback: Critique Les enfants ne se laissaient pas faire - Patrick Robert