Des réalités alternatives, un mélange de voyage psychédélique et de brutalisme à l’anglaise des années 1980, des jeux vidéo programmés à une époque où l’industrie en était encore à ses balbutiements… Que demander de plus? L’équipe de Black Mirror donne dans l’expérimentation avec Bandersnatch, un film « dont vous êtes le héros » lancé pendant les Fêtes sur Netflix.
https://www.youtube.com/watch?v=XM0xWpBYlNM
Stefan Butler (Fionn Whitehead) est à l’image des clichés circulant à propos des programmeurs et des amateurs de jeux vidéo: renfermé, plongé dans son monde, il tente d’adapter un livre dont vous êtes le héros, justement intitulé Bandersnatch. Livre que sa défunte mère a longtemps gardé auprès d’elle. Car rien n’est simple, dans ce film; nous sommes dans Black Mirror, après tout, et le créateur de la série, Charlie Booker, prend un plaisir presque sadique à proposer des histoires et des personnages torturés.
Sous pression pour programmer un jeu évoquant les questions des réalités alternatives et de la liberté de choix, aux prises avec d’importants problèmes psychologiques depuis la mort de sa mère, et désireux de se faire respecter de la part de Colin Ritman (Will Poulter), un créateur de jeux qu’il idolâtre, Stefan s’enfonce dans l’instabilité et la démence.
Outre sa prémisse certainement intéressante – qui n’aime pas les réalités alternatives et les jeux vidéo rétro, après tout? –, Black Mirror a cherché à frapper un grand coup en ne proposant rien de moins qu’une aventure interactive. Le public pourra, à plusieurs reprises, décider d’emprunter un embranchement narratif plutôt qu’un autre, et ainsi modifier profondément le cours de l’histoire. Ces choix, toujours binaires, mènent quelques fois à des impasses, qui proposeront alors de revenir en arrière pour choisir une nouvelle solution. Ou ils feront alors déboucher le scénario sur l’une des cinq fins possibles, correspondant toutes à une cote accordée par un critique au jeu Bandersnatch.
Idée originale, du moins dans un format du genre, l’oeuvre impliquera certainement plusieurs retours en arrière et recommencements pour parvenir à la fin souhaitée. Si les créateurs évoquent une durée de 90 minutes en se trompant quelques fois en cours de route, il a fort à parier qu’il sera plutôt nécessaire de s’installer devant son ordinateur pendant quelques heures afin d’explorer toutes surprises que réserve Bandersnatch.
Ceci étant dit, et s’il faut souligner la volonté des créateurs de Black Mirror de sortir des sentiers battus, la notion d’embranchements scénaristiques est ici trop peu exploitée. Le public n’aura jamais que deux options, bien souvent sans disposer d’aucun indice quant aux conséquences à moyen ou long terme des actions. Oui, la série cherche toujours à surprendre, et la notion d’imprévu et d’absence de contrôle cadre tout à fait avec la réflexion sur le libre arbitre à laquelle se livre le personnage principal. Malgré tout, on a l’impression d’assister à une lubie des scénaristes, plutôt qu’à un exercice entièrement abouti. Et une fois « l’épisode » complété une ou deux fois, avec des résultats parfois carrément catastrophiques, on ne trouvera pas la motivation suffisante pour replonger dans Bandersnatch depuis ses débuts et tenter de trouver d’autres fins.
L’aventure est donc divertissante, mais ne laissera probablement pas d’impression à long terme, contrairement à d’autres épisodes de Black Mirror plus traditionnels, certes, mais surtout plus approfondis.
2 commentaires
Pingback: Late Shift, l'aventure à haut risque - pieuvre.ca
Pingback: Black Mirror, saison 5: dystopie aux tons de beige - pieuvre.ca