Vingt-cinq ans! Doom, classique parmi les classiques du jeu vidéo, soufflait cette semaine ses 25 ans. Et à cet âge plus que vénérable pour le milieu du divertissement numérique, le titre demeure un incontournable qui n’a pas pris une ride. Ou si peu.
Nous sommes en 1993: la petite équipe de développeurs du tout aussi petit studio id Software déclenche une révolution. Doom, avec ses graphismes révolutionnaires pour l’époque et sa violence sans concessions, va marquer à jamais l’histoire des jeux vidéo.
Au début des années 1990, en effet, les jeux en trois dimensions commencent à peine à apparaître sur le marché, bien souvent avec quelques trucs pour dissimuler des limitations techniques. Il y a bien eu quelques prédécesseurs, y compris un autre titre iconique, Wolfenstein 3D – lui aussi développé par id Software, d’ailleurs –, mais créer un véritable environnement en trois dimensions pose encore problème. Les méchants et les objets de Wolfenstein 3D seront plutôt des sprites, des objets en deux dimensions à qui l’on donnera l’impression d’avoir du relief en les faisant pivoter pour « suivre » le joueur des yeux. Le tour de passe-passe est assez évident, surtout près de 30 ans plus tard, mais la magie opère.
Doom sortira environ un an seulement après Wolfenstein 3D. Du grand-père des jeux de tir à la première personne, on passe ainsi au père, celui qui fait véritablement entrer le genre dans l’époque contemporaine. Oui, il y a encore des sprites, mais ceux-ci sont plus complets, et n’ont habituellement plus l’aspect de panneaux en carton qui pivotent sur un socle au passage du personnage principal. Ce qui ressort, toutefois, c’est surtout la matérialité du monde dans lequel le joueur évolue. Finis, les labyrinthes de corridors toujours plats dans lesquels évolue B.J. Blaskowicz, le prisonnier américain tentant de fuir un château rempli de nazis. Les niveaux de Doom permettent d’emprunter des escaliers; des blocs bien solides représentent qui des obstacles, qui des chemins à suivre; les objets ont une profondeur, une présence, une substance.
Finie, aussi, l’ambiance Deuxième Guerre mondiale, et place aux ennemis mutants de l’espace! En tant que dernier survivant d’une base de recherche terrienne où l’on a ouvert un portail donnant directement sur l’enfer, il vous revient la tâche ingrate de faire le ménage. D’abord armé d’un pistolet, le joueur mettra bientôt la main sur un arsenal complet servant à faire exploser soldats morts-vivants, démons et autres créatures infernales. En s’appuyant sur des références à la musique métal et hard rock que les créateurs écoutaient en boucle en codant leur jeu, Doom s’en donne à coeur joie, au risque même, à l’époque, de déplaire aux autorités américaines, qui ont toujours été chatouilleuses en la matière.
Sang, tripes qui éclaboussent, scie à chaîne que l’on prend un plaisir jouissif à utiliser contre des ennemis qui hurlent de douleur, le tout sur une musique en MIDI, certes, mais néanmoins excellente… Comment ne pas se retrouver dans la peau d’un adolescent, en éprouvant une sensation d’exaltation en zigzagant entre les tirs et les boules d’énergie, et en ne souhaitant que deux choses, tuer des envahisseurs des enfers et compléter un niveau le plus rapidement possible?
Bien sûr, Doom fait aussi son âge. C’était l’époque où la formule des touches WASD n’avait pas encore été standardisée dans les jeux de tir à la première personne. Notre personnage était contrôlé à la manière d’un char d’assaut, soit sans pouvoir regarder librement dans l’environnement avec la souris et combiner le tout aux touches d’avance, de recul et d’esquive. On utilisait plutôt les touches fléchées pour se déplacer et la touche Contrôle pour faire feu, le niveau de l’arme demeurant fixement à l’horizontale, à moins que l’on n’utilise d’autres touches, forcément éloignées des touches fléchées et peu pratiques à manipuler. Pas question, non plus, de sauter ou de se cacher en s’accroupissant. Les niveaux étaient d’ailleurs conçus en ce sens.
Doom était simple, enivrant, excitant, passionnant. Le jeu l’est encore aujourd’hui… à condition, bien entendu, de procéder à quelques modifications pour tirer davantage parti des avancées technologiques réalisées au cours des 25 dernières années. Il y a d’ailleurs eu trois suites officielles sur PC, toutes trois bâtissant sur les fondations construites par ce titan du jeu vidéo. Et si chacune de ces déclinaisons s’est peut-être un peu éloignée du contenu original, il n’en reste pas moins qu’un quart de siècle plus tard, le nom de Doom évoque toujours l’univers incroyable d’un space marine devant terrasser des hordes démoniaques pour sauver sa peau.
Pour les amateurs de nostalgie, Doom 1 et 2 se retrouvent dans quantité de compilations et autres déclinaisons vendues sur des boutiques en ligne ou errant ici et là, dans des formats pas toujours légaux, dans les recoins du web. Mieux encore, il se produit toujours des niveaux personnalisés et du contenu supplémentaire pour les deux premiers titres de la série, et plusieurs joueurs diffusant sur le service Twitch organisent entre autres des concours où les créations les plus originales sont récompensées.
Doom évoque ainsi le bon vin qui a particulièrement bien vieilli. Jouable dans sa version originale (en grinçant un peu des dents, certes), ou dans l’une de ses très nombreuses versions remaniées, avec, dans les oreilles, une trame sonore toujours solide, quand il ne s’agit pas de l’extraordinaire reprise par Andrew Hulshult, le jeu est un incontournable.
Monument dédié au fol enthousiasme du début des années 1990, Doom est encore l’un des meilleurs jeux de tous les temps. Ce quart de siècle lui va à ravir, et au vu du succès amplement mérité de Doom, édition de 2016, il y a fort à parier que la saga a encore de longues et belles années devant elle.
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