Si vous avez entendu parler de la résolution cette semaine d’un des plus importants mystères des mathématiques, faites comme les mathématiciens: soyez sceptiques. Une occasion de rappeler quelque chose de fondamental en science: pour être pris au sérieux, il faut tout d’abord avoir publié.
Michael Atiya, 89 ans, n’est pourtant pas n’importe qui. Professeur émérite à l’Université d’Édimbourg, gagnant de la prestigieuse Médaille Fields pour son travail en géométrie et en physique théorique, il est considéré par plusieurs comme le plus grand mathématicien du moment. Son annonce le 24 septembre, lors d’un congrès en Allemagne, comme quoi il aurait résolu « l’hypothèse de Riemann », un mystère de 160 ans, a donc créé de l’émoi. Mais aussi beaucoup de prudence: la « démonstration » déposée par Atiya consiste en un texte de cinq pages où la solution figure dans seulement sept lignes… qui renvoient à un autre texte qui, lui, n’a pas encore été publié (selon la revue Science, il serait en cours de révision).
S’il a frappé juste, ce n’est pas banal, explique pour sa part Science News. Un des problèmes fondamentaux des mathématiques se cache dans les nombres premiers — ces nombres qui ne peuvent être divisés que par 1 et par eux-mêmes, comme 3, 11 ou 23. La façon dont ils sont distribués a-t-elle un sens? L’hypothèse de Riemann, formulée en 1859 par le mathématicien allemand Bernhard Riemann, postule que oui, mais personne ne sait comment le prouver. Pour cette raison, l’hypothèse fait partie des « sept prix du millénaire »: sept défis mathématiques réputés insurmontables, lancés par l’Institut de mathématiques Clay en 2000. Quiconque réussira à résoudre l’un d’eux recevra une bourse d’un million de dollars. Depuis 18 ans, un seul, la conjecture de Poincaré, a réussi le test.