Michael Moore est désespéré. Du moins, c’est l’impression qu’on retire de Fahrenheit 11/9, le plus récent documentaire du coloré réalisateur. Articulé autour de Trump et des dérives du système politique américain, le film réussit quelques touches, sans atteindre les sommets de Bowling for Columbine et Fahrenheit 9/11.
Donald Trump est président des États-Unis. Et cela ulcère Michael Moore. Un Michael Moore qui était loin d’être un grand admirateur d’Hillary Clinton et de l’establishment du Parti démocrate, mais qui espérait malgré tout que l’odieux milliardaire n’accède pas au Bureau ovale.
Deux ans plus tard, cette présidence-spectacle se poursuit avec son lot d’absurdités et de gestes effrayants, et M. Moore, qui s’est toujours positionné comme défenseur des Américains de classe moyenne, reprend de nouveau du service pour dénoncer les coquins, les pourris et les autocrates en devenir, histoire d’insuffler un peu d’espoir à un peuple qui en a bien besoin.
Les magouilles de Trump, son sexisme, sa misogynie, son attirance perverse pour sa fille; mais aussi l’empoisonnement de l’eau potable de Flint, au Michigan; ou encore la fusillade à Parkland, en Floride, sont tout autant de sujets abordés dans ce Fahrenheit 11/9 où, à l’instar de trop nombreux assassins munis d’armes que l’on peut aisément se procurer, Michael Moore vise tout ce qui bouge en espérant faire mouche. La démarche est noble, soit, et il est un peu ahurissant de s’entendre raconter que Trump s’est lancé en politique pour pousser les dirigeants de NBC à hausser son salaire – qui était plus bas que celui de Gwen Stephani à The Voice, semble-t-il -, mais le résultat laisse un peu à désirer.
Déjà, dans Bowling for Columbine, Moore faisait feu de tout bois, mais le sujet était celui des conditions sociales, économiques et politiques qui avaient conduit à ce massacre. Ici, de quoi est-il question? Des mêmes problèmes socio-économiques, bien entendu; de la même incurie politique, mais sans ce petit quelque chose qui avait marqué. Après deux ans de présidence Trump, la planète est épuisée. Tous les jours, le chef d’État américain provoque une nouvelle controverse, écrit une nouvelle absurdité, fait craindre pour la liberté de presse et l’avenir de la démocratie américaine. La population, elle, a parfois décidé de passer à autre chose, lasse de l’omniprésence du magnat de l’immobilier sur internet, dans les journaux, à la télévision.
En souhaitant nous rassurer en disant qu’il existe des solutions, que de « véritables Américains » – pas ceux qui sont corrompus par le pouvoir, pas ceux attirés par l’appât du gain, pas ceux qui mangent dans la main des grandes compagnies – prennent les « armes » politiques pour défendre leurs valeurs, Michael Moore flatte son public dans le sens du poil. Oui, la situation va mal, mais…
Il faut attendre la toute fin du documentaire pour que la « machine Michael Moore », celle qui se répète depuis bientôt une dizaine de films, laisse enfin apparaître ses lignes de faille. La toute fin du film pour que ce réalisateur ventripotent, mal fagoté, le cheveu filasse, finisse par admettre ce qui a été compris par bien d’autres pays depuis belle lurette: « Faut-il vraiment sauver l’Amérique, si elle n’a jamais été ce pays que nous imaginons? »
La voilà, la remise en question plus que nécessaire. Tandis qu’un peuple se berce d’illusions, et qu’un politicien est conspué pour affirmer qu’America was never that great to begin with – même si le politicien en question, Andrew Cuomo, fait partie de la vieille garde démocrate qui mérite amplement de finir aux poubelles de l’histoire -, il faut se rendre à l’évidence: le système américain est gangrené depuis très longtemps. Et il faudra que cette relève diversifiée, venant de la rue et des meilleures universités, garde cela en tête.
L’avertissement vaut aussi pour les Canadiens et les Québécois. Les premiers éliront un nouveau gouvernement l’an prochain, et les seconds iront aux urnes dans deux semaines. Le temps presse pour transformer, pour oser, pour agir. Pour la planète, pour les aînés et les jeunes, pour défendre ce qui a été si chèrement acquis.
En cela, Fahrenheit 11/9, qui prendra l’affiche vendredi 21 septembre, représente une première étape. Avec de la chance, elle ne sera pas la seule.
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