Étrangement, la démission du ministre français de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot, le 28 août, a fait beaucoup plus jaser que son annonce du Jour du dépassement le 1er août. Dirigeant son bureau de design industriel à Amsterdam, Babette Porcelijn démystifie et relativise notre rapport à l’environnement avec le livre Notre empreinte cachée: tout ce qu’il faut savoir pour vivre d’un pas léger sur la Terre paru aux Éditions du Seuil.
Puisque nous sommes en campagne électorale, pourquoi ne pas mettre les orientations des partis politiques en relation avec les données du livre, à commencer par l’accord de Paris de 2015 sur le climat visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre? Selon l’auteure, pour atteindre l’objectif de ramener les émissions de CO2 à zéro d’ici 2040, les gouvernements doivent cesser immédiatement les investissements dans les industries fossiles et leur utilisation doit cesser avant la date butoir. Oléoduc, sables bitumineux, industrie de l’automobile à essence: le gouvernement canadien se rebute au défi considérable de transformation de son économie, mais ce qui nous intéresse c’est le Québec qui n’a pas renoncé à son indépendance.
Réduire l’émission de CO2 est un premier pas, mais l’empreinte écologique cachée relève de plusieurs autres facteurs qui modulent l’équation. En tant qu’individu, l’objectif est plutôt d’avoir un mode de vie éconeutre ou passif, ou encore écopositif, c’est-à-dire quand nos impacts positifs en faveur de la planète sont plus importants que les négatifs. D’un côté, se concentrer seulement sur la partie visible mène à faire des écogestes qui soulagent sans rien changer, et d’un autre côté, l’industrie de combustibles fossiles subventionnée avec de l’argent public engendre des coûts pour la société. Le Fond monétaire international (FMI) estime à 5300 milliards d’euros à l’échelle mondiale les coûts liés aux ouragans, aux inondations et aux maladies respiratoires, donne-t-on en exemple.
Québec solidaire propose d’augmenter les redevances de l’eau de 70$ par million de litres consommés à 5000$ pour les compagnies minières, et à 750$ pour les manufacturiers. De l’ensemble de l’eau douce que l’on retrouve sur Terre, seulement 0,4 % se trouve en surface et dans l’air; sa rareté en fait un or bleu. Près de la moitié de notre consommation d’eau est dissimulée dans les produits et les aliments importés, consommant la ressource en eau d’autres pays. La majeure partie de l’eau liée à un pantalon jean n’est pas celle qui sert à le laver, mais celle qui est nécessaire à la culture des plants de coton.
À l’instar de l’ours polaire amaigri, les images d’animaux étouffés ont sensibilisé la population à la pollution plastique. Tenant compte de l’usure des pneus, des vêtements, de la peinture aux Pays-Bas, ce sont les objets de plastiques errants comme une bouteille, un sac ou un ballon du Hollandais moyen qui sont à l’origine de ce continent de plastique qui flotte dans nos océans.
Selon le spécialiste des sciences et matériaux, Kaspar Jansen, un litre d’essence suffit à la fabrication de vingt petits canards jaunes en plastique que l’on met dans le bain.
Nord convoité
Au palmarès des dix impacts sur l’écosystème au quotidien, les produits de consommation arrivent en tête en grande partie dus aux gaz à effets de serre cachés nécessaires à leur production. L’extraction des matières premières dans le processus de production d’un ordinateur ou d’un téléphone intelligent est à l’origine de 95 % de leur impact global. Toutes les autres étapes du cycle de vie de ces produits de haute technologie, dont le transport et l’électricité utilisée, ont moins d’impact.
Malgré leur bisbille de début de campagne électorale, les deux chefs libéraux ont fait preuve du même autoritarisme à l’égard de l’environnement: le lancement du Plan Nord dans le but d’exploiter les ressources minières de cette région éloignée par Jean Charest et l’adoption sous bâillon de la politique énergétique 2030, incluant l’exploitation des hydrocarbures par le gouvernement de Philippe Couillard. La fonte de l’Arctique est-elle vue par les partis libéraux provincial et fédéral comme une occasion de s’enrichir par l’exploitation de son sous-sol?
La fonte de la calotte glaciaire, des glaciers et du pergélisol, source principale d’eau douce, va entrainer une augmentation de la température sur Terre. Parmi les données insolites et toujours justifiées du livre, les citoyens d’Amsterdam auront de l’eau au genou s’il y a une augmentation de 2 degrés Celsius, même effet pour les citoyens de New York, pour une hausse variant entre 3 et 4 degrés. L’économiste Nicholas Stern estime que la prévention coûterait de 1% à 2% de notre produit intérieur brut (PIB), mais si nous ne faisons rien, il nous en coûtera plus tard entre 5% et 20%.
L’initiative de Babette Porcelijn offre un tour d’horizon laborieux débordant de graphiques et d’illustrations qui enlève de la lourdeur aux multiples calculs. Commentant son ouvrage en adoptant un ton d’égal à égal avec le lecteur, la designer invite à participer à l’élaboration de ce projet qui propose des solutions efficaces et concrètes.
Si les données de la première version se basent sur la société néerlandaise et ceux de la version française sur la France, l’essentiel demeure transposable à la société québécoise.
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3 commentaires
Bonjour, en fait j’ai lu par ailleurs que ces continents en plastique sont dus pour 90% à une dizaine de fleuves qui rejettent les plastiques en mer, dont 8 en Asie et 2 en Afrique. Vous devez retrouver ceci sur le net.
Le Canada à effectivement une empreinte tout-a-fait excessive et qu’il doit impérativement faire baisser. Il n’empêche que vous êtes un pays créditeur sur le plan écologique et ce du fait de l’immensité de votre pays et de votre faible population qui d’un point de vue strictement écologique devrait éviter d’augmenter.
Je vous conseille la lecture d’un article assez fouillé que j’ai publié il y a un mois sur le site de l’association Démographie Responsable et auquel on accède en faisant défiler la page du site jusqu’à un graphique.
En espérant un retour de votre lecture,
Bien cordialement,
Denis Garnier (président de l’association)
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