Partager sur les réseaux sociaux des informations inquiétantes sur les changements climatiques, c’est une chose. En parler autour de nous, c’en est une autre. En évitant le sujet, on éviterait apparemment d’accroître notre anxiété.
C’est une des conclusions qui était contenue dans un rapport de mars dernier pondu par un groupe de recherche spécialement dévolu à la communication des changements climatiques (Yale Program on Climate Change Communication). Les chercheurs de l’Université Yale y présentaient, entre autres paradoxes, que bien que 70% des Américains soient convaincus de la réalité du réchauffement et que 58% soient d’accord pour dire qu’il est surtout causé par l’action humaine, ils sont néanmoins 65% à dire qu’ils en discutent « rarement » ou « jamais » avec leurs amis ou leur famille. Les raisons sont nombreuses — le sujet ne vient pas, tout le monde est d’accord, c’est « trop politique » —, mais en bout de ligne, les chercheurs y voient plutôt un mécanisme psychologique: l’évitement, la dérobade.
On peut briser ce cycle, affirme le psychologue Michael Smyer dans un billet de blogue paru vendredi: « Imaginez un endroit qui a une signification spéciale pour vous. À présent, imaginez cet endroit affecté par une météo extrême ou un changement climatique. Ensuite, imaginez comment vous aimeriez voir cet endroit dans 40 ou 50 ans. Enfin, imaginez quelque chose que vous pourriez faire maintenant pour travailler à cette dernière vision. »
Smyer est derrière un autre projet de communication du climat, destiné aux personnes âgées celui-là (Graying Green: Climate Action for an Aging World).
L’idée de se battre pour préserver un lieu qu’on aime n’est pas réservée aux militants environnementaux. Des recherches ont démontré que même un climatosceptique peut être convaincu d’agir pour défendre l’environnement, dès qu’il prend conscience qu’un lieu qui lui est cher est à risque d’être ravagé, voire déjà en train de l’être.
Smyer écrivait cet appel en prévision de la journée internationale de mobilisation sur le climat, qui avait lieu samedi. Son souhait, rejoignant celui de beaucoup d’autres qui ont marché samedi, est que les gens capables de se projeter dans 40 ou 50 ans ne s’arrêtent pas à une journée de manifestation ou un tweet, mais qu’ils en parlent autour d’eux et à leurs décideurs — en temps d’élection, par exemple, ou au sein de leur lieu de travail. Et ce, en choisissant les arguments qui rejoindront ces gens: des arguments à saveur locale ou régionale, associés à un délai qu’on peut visualiser (40 ans plutôt que 100 ans) et à du positif — des actions qu’il est possible d’entreprendre individuellement.