De l’Australie au Canada en passant par la France, la lutte contre les gaz à effet de serre traverse une phase difficile. Et on ne parle même pas des États-Unis.
La démission de l’environnementaliste Nicolas Hulot, qui portait le titre ambitieux de ministre de la Transition écologique, a braqué les projecteurs sur la timidité de ladite « transition écologique » du gouvernement français. Mais elle ne fait pas de la France une anomalie: la semaine dernière, le premier ministre australien Malcolm Turnbull a été poussé vers la sortie par les membres de son propre parti, le compromis « modéré » de politique énergétique qu’il avait proposé le 17 août ayant apparemment été jugé trop « agressif » par les plus conservateurs de ses députés. La politique avait été retirée le 20 août, ce qui n’a pas mis fin à la fronde.
Le fils de l’ex-premier ministre a accusé les lobbyistes du charbon et leurs liens avec certains membres du parti qui lorgnaient déjà la succession de Turnbull. Que ce soit vrai ou faux, il est certain que les lobbyistes du charbon sont, aux États-Unis, très présents autour du gouvernement Trump: même le nouveau directeur de l’Agence de protection de l’environnement, Andrew Wheeler — qui remplace le « célèbre » Scott Pruitt depuis sa démission le mois dernier — est un ancien lobbyiste du charbon, et « fier de l’être ». De plus, défendre le charbon contre les « lois environnementales injustes » est un thème récurrent de Trump depuis sa campagne électorale, en dépit des réalités économiques: le charbon est en déclin aux États-Unis depuis au moins deux décennies, bien avant les lois environnementales. Le déclin est également marqué en Australie.
Quant au Canada, si le charbon n’est pas un enjeu politique, le pétrole l’est. L’achat controversé par le gouvernement Trudeau du pipeline TransMountain, en dépit de l’opposition de la Colombie-Britannique, est arrivé dans la foulée d’un recul sur le projet-phare de prix national sur le carbone. En octobre 2016, le gouvernement avait annoncé un tarif de 10 $ la tonne dès 2018, qui augmenterait chaque année pour atteindre 50 $ en 2022. Le mois dernier, il annonce un assouplissement de cette politique pour les industries les plus énergivores. Dans un contexte où le lourd voisin du Sud semble lancé dans une guerre commerciale avec le reste de la planète: du coup, un prix sur le carbone est présenté par les industriels comme un fardeau qui les rendra moins compétitifs.
Se pointe aussi la possibilité qu’un gouvernement conservateur reprenne le pouvoir à Ottawa en promettant d’éliminer cette taxe au carbone. L’Australie est déjà passée par là: elle avait adopté une telle politique en 2012, pour la voir annulée deux ans plus tard.
Point commun à tous ces pays: des politiques à court terme. Les dividendes immédiats du charbon et du pétrole sont jugés plus importants par les politiciens, surtout ceux du centre et de la droite selon The Atlantic. Et cela ne leur fait pas perdre trop de votes, à en juger par la faible place qu’occupe l’enjeu dans les campagnes électorales. Même en Australie, en dépit des records de sécheresses.
Un des rares endroits qui fait contraste en cet été caniculaire: la Californie. Elle vote cette semaine une loi qualifiée « d’historique », qui imposera une économie sans carbone d’ici 2045. Une loi précédente dictait déjà que 50% de l’électricité doive provenir de sources renouvelables d’ici 2030; l’objectif est à présent de 60%. De plus, la Californie semble déterminée à tenir tête au gouvernement Trump qui voudrait assouplir au niveau national les normes anti-pollution de l’automobile. Les normes de la Californie sont plus sévères et, à cause du poids économique de cet État (un dixième de la population américaine), les constructeurs automobiles préfèrent s’y conformer plutôt que de fabriquer deux modèles pour chaque voiture.
Un détail parmi d’autres de la nouvelle loi californienne: 35% des revenus de leur taxe carbone devront aller à des quartiers à faibles revenus.
https://www.pieuvre.ca/2018/08/28/le-ministre-francais-de-lecologie-nicolas-hulot-demissionne-en-direct/