Dans la rubrique « Celui-là est resté caché dans ma pile », j’ai découvert La nuit recommencée de Leopoldo Brizuela, paru en 2012 sous le titre Una misma noche et chez Seuil en 2014 pour la traduction française. Brizuela est l’auteur de plus d’une dizaine d’ouvrages: romans, nouvelles, poésie et récit.
Dans cette histoire, le narrateur est lui-même écrivain et il vivra, étape par étape, un retour en arrière d’une trentaine d’années, en pleine dictature de la junte militaire. C’est après avoir été témoin d’une entrée par effraction chez ses voisins, que le narrateur commence à se poser des questions et à en poser autour de lui. Des bribes de souvenirs remonteront tranquillement à la surface et le personnage principal ne sera pas d’emblée convaincu qu’il souhaite vraiment se rappeler tout ce qui s’est passé trente ans plus tôt. Qui savait quoi, qui s’est tu, qui s’est rendu complice pour ne pas être victime ou, davantage victime?
À travers cette résolution d’un stress post-traumatique, ce sont certains éléments d’une période très sombre de l’histoire de l’Argentine qui sont racontés par le menu. Le roman a beau être garanti fictif, les repères historiques étant ce qu’ils sont, on a l’impression de vraiment y être et que les témoignages qui nous sont présentés sont pure vérité, hélas! Hélas pour celles et ceux qui ont vécu cette période et non pour le lecteur.
En effet, le style de Brizuela est sans prétention, mais très efficace. On suit le narrateur dans ses pérégrinations mnémoniques et on souhaite, tout autant qu’on craint, qu’il découvre finalement la vérité, toute la vérité sur la fameuse nuit de son enfance où des hommes en uniforme ont fait irruption chez lui, ont posé des questions et ont finalement réquisitionné l’intervention de son père déjà âgé pour intervenir chez leurs voisins.
Ce récit, pardon, ce roman a toutes les caractéristiques d’un devoir de mémoire. Si c’était là le but de l’auteur, on peut dire mission accomplie.