Si le succès de la nouvelle fusée d’Elon Musk démontre que la commercialisation des voyages spatiaux est bel et bien en marche, il était difficile de trouver un meilleur symbole de commercialisation que l’envoi d’une voiture en orbite.
Les images de la Tesla décapotable rouge cerise et de son mannequin — Starman — au volant sont en effet devenues mardi la « pub de char » la plus coûteuse de l’histoire de l’automobile. Mais l’événement n’était pas que ça: c’était aussi le premier vol d’essai de la nouvelle fusée Falcon Heavy et comme celle-ci n’avait pas à transporter de satellite, la place était libre pour… autre chose. « La décision de remplacer la charge utile par une Tesla était une démonstration intelligente de la promotion croisée dont seulement Musk est capable », écrit dans The Atlantic la journaliste Marina Koren. Elon Musk, le milliardaire derrière SpaceX — la compagnie qui, depuis 2010, met des satellites en orbite avec ses fusées Falcon 9 — l’homme qui rêve d’organiser le premier voyage habité vers Mars, et l’homme derrière la voiture électrique Tesla.
L’image est si forte qu’elle marquera les esprits bien davantage que le succès de ce premier lancement de la Falcon Heavy — lancement pourtant réussi sur presque toute la ligne. Deux minutes et demie après le décollage mardi à 15 h 45 depuis Cap Canaveral, les deux fusées latérales se sont détachées et sont venues se poser sur leurs plateformes respectives avec une parfaite synchronicité. La troisième fusée, par contre, s’est perdue dans l’Atlantique, à quelques centaines de mètres de sa plateforme, a-t-on admis en conférence de presse dans la soirée. Et quant au deuxième étage de la fusée et la Tesla qu’il transporte, après quelques heures en orbite terrestre, ils étaient en train de se placer sur une trajectoire censée les amener sur une large orbite elliptique autour du Soleil — si large que l’engin pourrait y rester pendant des « millions » d’années… et, à l’occasion, passer à proximité de Mars. Encore un symbole.
Plus prosaïquement, la Falcon Heavy est, insiste le communiqué de presse, « la plus puissante fusée actuellement opérationnelle dans le monde ». Trois fois plus puissante que la Falcon 9, elle pourra donc mettre en orbite des charges utiles plus lourdes (jusqu’à 63 tonnes) et du coup, concurrencer les fusées Soyouz et Ariane: c’est la première fois qu’un engin conçu par une compagnie privée (bien que sans les contrats de la NASA, la compagnie n’existerait pas) est capable de concurrencer les fusées conçues prioritairement, depuis des décennies, par les agences gouvernementales. Par ailleurs, Falcon Heavy serait, en théorie, la première étape vers une fusée encore plus puissante — destinée au fameux voyage vers Mars — appelée BFR pour… Big Fucking Rocket.
En attendant, si les vols suivants confirment la fiabilité de cette fusée-ci, la facture pour envoyer quelque chose dans l’espace avec une Falcon Heavy pourrait s’élever à 90 millions $ — plutôt coûteux pour une publicité de voiture, mais moins que les 350 millions de la fusée Delta IV, la plus proche concurrente. Une nouvelle « course à l’espace » est peut-être en train de commencer, et elle ne se mesurera pas en voitures rouges.
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