Notre bibliothèque – À vos livres est une production du Théâtre Blanc de Québec et du 140 de Bruxelles, en codiffusion avec le Théâtre de Quat’sous. Pour trois soirs seulement, Christian Lapointe nous conviait tous à un happening de lecture à vue en continu, de 18h00 à minuit.
Le principe est simple: huit artistes-lecteurs par soir, 30 minutes chacun, pour un total de quatre heures, pendant trois jours. Le public peut aller et venir comme il le veut (de préférence entre les lectures), aller se chercher un verre de vin, prendre des photos, les partager sur les réseaux sociaux. Une seule chose est obligatoire: chaque spectateur se doit d’apporter un livre pour entrer, qu’il pourra déposer sur la montagne qui trône sur scène. La pile s’agrandira ainsi, de représentation en représentation.
S’alternent donc sur scène des dramaturges, metteurs en scènes et acteurs. Ils ont tous une manière différente de sélectionner leur choix de lecture. Certains s’inspirent des titres d’œuvres qu’ils ne connaissent pas, d’autres veulent partager quelque chose qui les a touchés ou simplement qu’ils connaissent bien, alors que d’autres se donnent la liberté de mélanger les styles, les genres, les auteurs. Le tout est accompagné de musiciens qui improvisent et installent différentes ambiances, selon le livre choisi. Stéphane Caron et Frédérick Desroches sont particulièrement à l’écoute et l’atmosphère s’en voit bonifiée.
Pendant les trois représentations, les spectateurs font la connaissance de Mathieu Arsenault, François Édouard Bernier, Sarah Berthiaume, Émilie Bibeau, Marie Brassard, Fabien Cloutier, Sébastien David, Évelyne de la Chenelière, Myriam de Verger, Sophie Desmarais, Frédéric Dubois, Alain Farah, Marie-Thérèse Fortin, Maude Guérin, Catherine Lalonde, Ève Landry, Antoine Laprise, Justin Laramée, Didier Lucien, Olivier Morin, Stanley Péan, Marcel Pomerlo, Elkahna Talbi et Inès Talbi.
N’ayant pas assisté aux quatre heures de représentation, je ne peux donner mes impressions que sur les premiers lecteurs. Je vous laisse deviner la différence entre la lecture de Marie Brassard et celle de Fabien Cloutier! Pour les interprètes ainsi que pour le public, il y a un aspect imprévisible. L’impression que tout peut arriver met un petit quelque chose de fébrile dans l’air. Les artistes doivent réagir aux commentaires du public, qui se donne parfois un peu trop de liberté, et s’y faire. Rien n’est préparé, les spectateurs doivent donc s’attendre à un résultat décousu, mais attachant. De plus, il n’en faut pas beaucoup pour que quelques moments mémorables émergent de ces lectures improvisées. Je pense à Sarah Berthiaume, si émue de lire un extrait d’une pièce sur la maternité, Venir au monde d’Anne-Marie Olivier, qu’elle doit s’arrêter un instant. Marie Brassard qui partage un moment magique qu’elle a vécu avec Jean-Pierre Ronfard, en lisant le monologue du temps dans Vie et Mort du Roi boiteux. La scène exhibe un environnement feutré, avec son grand fauteuil antique et son feu de foyer crépitant. C’est réconfortant, c’est fait pour qu’on se sente bien, c’est beau.
Ce happening nous ramène à la base de la création; du temps du conte, où qui le voulait bien venait s’asseoir et écoutait quelqu’un d’autre raconter une histoire. Les spectateurs deviennent les témoins de ce moment de pur délice, se laissant entraîner par la musique des mots. Les yeux ouverts ou fermés, mais l’oreille attentive, prêts à être émerveillés par un monde créé de toute pièce, qui s’anime, tranquillement, dans leur tête.
En complément:
Un commentaire
Pingback: Chaloupe, la sexualité à l’allemande