Une autre année, une autre saison de Black Mirror. Une autre année et des poussières, devrait-on dire, puisque la nouvelle fournée d’épisodes de la série dystopique mise au point par le grinçant Charlie Booker est cette fois débarquée sur Netflix en plein congé des Fêtes, plutôt qu’à la fin de l’automne, comme ce fut le cas en 2016.
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Qu’à cela ne tienne, la population avait particulièrement hâte de se mettre six nouveaux épisodes sous la dent. Malheureusement, si les critiques ne manquaient pas à propos de la minceur du scénario de la précédente mouture, cette fois, la déception n’est pas simplement au rendez-vous, mais est plutôt aussi amère que les thèmes allègrement évoqués par Booker.
Jeux de pouvoirs des hommes en position d’autorité face à leurs employées féminines, surveillance constante, utilisation de la technologie à mauvais escient, les thèmes semblent se répéter, mais grâce aux (trop) nombreuses mauvaises nouvelles de l’année 2017 – et de 2018, dont les débuts sont déjà tristement spectaculaires -, ils demeurent ô combien d’actualité.
Les aventures du USS Callister, d’abord, avec la notion d’abus de pouvoir des hommes sur les femmes en son coeur, tombe à pic, les dénonciations d’agressions et de mauvais traitements ne cessant de faire noircir des pages de journaux et de sites d’information. Au sein d’une entreprise offrant de plonger dans un univers de science-fiction infini qu’il est possible d’explorer comme bon nous semble, le responsable des technologies, amateur avoué d’une version modifiée de Star Trek « kidnappe » les personnalités de ses employés pour s’en servir comme membres d’équipage qu’il torture psychologiquement, n’hésitant pas à les transformer en « méchants », voire en monstres si l’envie lui en prend.
Si ce concept d’univers fermé où sont prisonniers des « copies » de véritables personnes est bien présenté, et en évitant de tomber dans les divulgâcheurs, le fait que le dirigeant en question puisse copier les souvenirs et la personnalité d’une personne en numérisant uniquement son ADN gâche une bonne partie du plaisir.
Idem pour le deuxième épisode, Arkangel, où une mère inquiète pour son enfant et décide de lui faire installer une puce permettant de surveiller, en tous temps, divers signes vitaux, en plus de pouvoir observer le monde par les yeux de sa fille, voire de bloquer des images jugées stressantes; il s’agit là d’un terreau particulièrement fertile où l’équipe de tournage et les scénaristes auraient pu aborder la question de la liberté des individus, de la nécessité pour une mère de protéger ses enfants, voire de l’appartenance des données recueillies.
Malheureusement, comme bien trop souvent dans cette quatrième saison, la technologie ne donne pas l’occasion d’approfondir des questionnements éthiques ou sociologiques, mais plutôt de servir simplement de béquille pour des histoires qui parviendraient probablement au même dénouement si l’on ne saupoudrait pas le tout de gadget insidieux.
Quelques perles
Mention spéciale, toutefois, au quatrième épisode de cette nouvelle saison, intitulée Hang the DJ. On y aborde la question des relations personnelles sous l’angle d’un système central décidant avec qui nos deux protagonistes vont passer des périodes prédéterminées de leur vie. Un peu comme si Tinder ou OKCupid prenaient le contrôle de tout l’aspect relations amoureuses et intimes de nos vies.
On y trouve suffisamment de non-dit pour titiller notre curiosité, et le tout se conclut avec une finale fort appréciée. De quoi (presque) racheter les épisodes précédents.
Chapeau, également, au sixième et dernier épisode de cette quatrième saison, Black Museum, où une jeune femme visite un étrange musée où sont entreposés « des objets qui ont causé le malheur », nous explique le propriétaire de l’endroit.
Non seulement y retrouve-t-on des allusions à d’autres épisodes de la saison, voire de la série dans son ensemble, mais la subdivision de l’épisode en trois sections s’emboîtant les unes dans les autres permet d’explorer tout autant de facettes des dérives possibles de la technologie, mais sans consacrer un temps superflu à des concepts qui pourraient peut-être tourner à vide s’ils étaient développés pendant 60 minutes, par exemple, plutôt que seulement 20.
Toutefois, la question se pose: s’agit-il d’un choix spécifiquement conçu pour changer un peu le style de la série, ou les scénaristes étaient-ils plutôt à court d’idées exploitables pendant un épisode complet?
Quoi qu’il en soit, ces deux épisodes mieux réussis atténuent quelque peu la déception provoqué par le reste de cette morne saison. Peut-être faut-il se rendre à l’évidence: après une vingtaine d’épisodes sur des enjeux sociaux, moraux et éthiques liés aux technologie, est-il temps de passer à autre chose?
En complément:
https://www.pieuvre.ca/2017/12/04/une-sixieme-saison-de-house-of-cards-sans-aucune-trace-de-kevin-spacey/
Un commentaire
Pingback: It: enfin un bon remake!