La nouvelle production du Théâtre Jésus, Shakespeare et Caroline, en codiffusion avec La Manufacture s’installe au Théâtre La Licorne. Il s’agit d’Os – La montagne blanche; texte et interprétation de Steve Gagnon dans une mise en scène de Denis Bernard.
Nous étions prévenus: il n’y aurait pas de sièges dans la salle. Le public était donc invité à assister au spectacle debout, un verre à la main, comme on assiste à un concert rock.
En effet, la ligne entre spectacle et concert était floue, trouble, et c’était bien comme cela. Steve Gagnon accueille le public, lui explique le déroulement, où il se placera dans l’espace, ce qu’il faut faire et ne pas faire. Il présente également ses musiciens et collaborateurs. Puis, il s’installe sur un praticable et la représentation commence. Ou était-elle déjà en cours?
Os parle d’un jeune homme. Il a perdu sa mère. Il devient archéologue. Il ne sait plus comment bien aimer sa Nathalie. Il va donc déterrer des os, loin. Il rencontre alors Edna. Celle-ci lui apprendra qu’il ne faut pas courir après les pigeons, que ça ne sert à rien, que ce n’est pas ça qu’il l’aidera à trouver ce qu’il est venu chercher, dans la montagne blanche.
Os est un monologue, un débit incessant de mots. Ou un concert de slam jouant leur album dans sa version intégrale. Gagnon est seul sur scène, accompagné de musique. Il s’adresse à sa mère, à sa copine, à lui-même. Il murmure sa douleur, crie sa joie et le contraire aussi. Il émane du texte et de l’acteur une violence et une tendresse qui se lient ensemble, qui se fondent l’un dans l’autre, qui lui permet d’affronter le deuil de sa mère.
Le style d’écriture de Gagnon est difficile à catégoriser. Poétique, sur la ligne entre cliché et magnifique, dans le quotidien du québécois, mais aussi dans le merveilleux; sa pièce a tout pour toucher ceux qui l’écoutent. Ses mots sont enveloppants. Sa voix également. Quelques spectateurs ont même fermé les yeux, afin d’être bien à l’écoute de la rythmique de la pièce, qui se répercute dans la musique et dans le jeu de l’acteur. Celui-ci donne tout ce qu’il a et donne l’impression de mettre ses tripes sur la table, dans toute sa naïveté, dans toute son amertume, dans toute son intensité, dans toute sa rage.
La mise en scène est simple. Quelques podiums éparpillés dans la salle et une console de son dans le coin. Le titre des différentes scènes, ou des chansons, était projeté sur deux écrans dans le fond de la salle. Sur chaque podium, un micro et différentes sortes de luminaires. Gagnon se promène d’une tribune à l’autre. Les spectateurs peuvent le suivre ou rester à l’arrière, selon leur bon vouloir. Ils peuvent même danser avec lui au rythme de la musique, s’ils le désirent. L’éclairage suit la cadence de la musique et ponctue le texte d’une manière efficace. Le concert prend forme sous nos yeux. Cela sort complètement des codes théâtraux conventionnels que nous connaissons bien.
Os aborde le deuil, l’enfance, la vie de banlieue, le départ d’un père et la beauté des Noëls en famille. Le personnage s’enfonce dans sa peine et a de la difficulté à grandir. Parviendra-t-il à se réconcilier avec la vie et surtout, avec lui-même? Il y aura toujours de la place sur les scènes de théâtre pour répondre à cette éternelle question. D’une durée d’une heure quinze, la représentation passe rapidement. Trop même. Et elle va droit au cœur. Os – La montagne blanche est présenté jusqu’au 1er décembre à la Petite Licorne.
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