L’idole, paru cet automne chez Boréal, est le plus récent roman de Louise Desjardins qui en avait déjà cinq à son actif et qui a été récompensée pour La love, son tout premier opus. C’est l’histoire d’Éveline une veuve sur le point de devenir arrière-grand-mère, originaire d’Abitibi et Montréalaise d’adoption qui décide de s’exiler en Argentine pour y finir sa vie.
Du moins, c’est ce qu’elle se dit, mais qu’elle n’a dit à personne de son entourage au moment de partir. Elle répète à tous ses nouveaux amis qu’elle se fait à Buenos Aires qu’elle a quitté sa patrie pour ne pas se donner en spectacle et pour n’être le fardeau de personne. En elle-même, elle se dit plutôt qu’elle veut finir sa vie seule, sans attache, à vivre comme cela lui plaît.
Dans les faits, elle est plutôt en fuite. Elle tente de fuir sa relation non résolue avec son défunt père. Elle se fuit aussi elle-même, car, au lieu de s’isoler, de passer inaperçue et d’avoir tout le temps pour être avec elle-même, en elle-même, elle s’empresse de se lier d’amitié avec pratiquement toutes les personnes qu’elle rencontre. Elle s’étourdit en sorties et en nouvelles amitiés.
Le personnage d’Éveline est donc ambivalent et plausible. Ce qui est moins plausible c’est que chaque personne dont elle fait la connaissance, aux antipodes de chez elle, semble avoir un lien avec elle. Elles parlent presque toutes français, sont déjà allées au Québec ou ont déjà vécu au même endroit qu’elle en Provence. Si c’est une métaphore pour dire que, où que nous allions, notre passé nous rattrape, c’est un peu gros.
L’ambivalence du personnage est aussi trop appuyée, à mon goût. Éveline se pose continuellement les mêmes questions: pourquoi mon histoire avec mon père n’est-elle pas réglée, ai-je bien fait de quitter mes enfants, mon frère, mes petits enfants sans le leur dire? De même pour le paradoxe d’Eva Perón, l’idole de la mère d’Éveline Perron (pas subtil) qui était bonne et mauvaise à la fois, adulée et honnie en même temps, un emblème et un mauvais souvenir pour les Argentins. Bref, on tourne un peu en rond, on attend quelque chose qui n’arrivera pas et on reste sur notre faim.