Sur une étrange planète à la surface uniformément recouverte de tours identiques, En, jeune femme à peine sortie d’un sommeil cryogénique d’un siècle, part à la recherche d’une méthode légendaire pouvant ressusciter un être aimé dont l’essence aurait été conservée dans un cube d’énergie.
Ce monde à la fois fascinant et inquiétant, c’est celui d’Echo, un jeu d’action tactique développé par Ultra Ultra, un studio de développement installé à Copenhague, au Danemark. Après un passage par le défunt mode Greenlight de la plateforme Steam, voilà que le titre autodistribué déferle sur PC, avec une sortie prévue très prochainement sur console.
En débarque donc sur la mystérieuse planète accompagnée, du moins en pensée, par London, une intelligence artificielle au sens de la répartie particulièrement développé. Est-il un ami? Un adversaire? Quoi qu’il en soit, nos deux personnages explorent conjointement ce lieu qui recèlerait monts et merveilles.
Plongeant allègrement dans la science-fiction, Echo crée pour nous un monde fait de créatures génétiquement programmées pour atteindre la perfection, le tout sous la coupe du « grand-père », qui leur assure qu’elles pourront un jour atteindre le paradis, un palais gigantesque où elles ne manqueront de rien. C’est justement ce palais que découvre En, un endroit magnifique mais désespérément vide.
Est-ce bien le cas, en fait? Car en entant de ressusciter cet être cher transporté pendant un siècle, En semble réactiver un étrange protocole menant à la création de copies d’elle-même. L’idée est déjà inquiétante, mais la suite l’est encore plus: les copies ont tout sauf de bons sentiments à l’égard du personnage principal. Et comme En ne peut survivre qu’à une seule attaque, le joueur devra multiplier les manoeuvres d’évitement et les gestes sournois pour échapper aux griffes de ces clones, ou encore les mettre hors d’état de nuire.
Le hic, c’est que le palais a plus d’un tour dans son sac. En tentant de ressusciter son être cher, En a provoqué un court-circuit dans le système régissant le fonctionnement du palais: le programme principal s’appuie maintenant sur un cycle de quelques minutes. Il y aura d’abord une période où toutes les lumières seront allumées, où il sera possible de recharger l’énergie dont dépend la combinaison d’En pour accomplir certaines actions (tirer, se laisser tomber à partir de certaines hauteurs importantes, etc.). Vient ensuite l’obscurité, où les clones sont toujours actifs, mais où beaucoup d’autres mécanismes, dont celui permettant d’enregistrer notre progression ailleurs qu’aux points de sauvegarde automatique, sont inopérants. Puis, c’est le noir total, l’immobilité de tous – y compris de En -, avant que le système redémarre.
Rapidement, on constatera que l’ordinateur central du palais « apprend » les gestes posés par En lors du cycle précédent. Elle court, elle s’accroupit, elle ouvre des portes, elle tire? Il y a de fortes chances que les copies en fasse tout autant au cycle suivant. Et si la courte période d’obscurité semble consacrée à cet « apprentissage », sans que les gestes posés alors aient des conséquences sur le comportement des copies, le redémarrage, lui, entraîne une bien mauvaise surprise: les clones reviennent à la vie.
Echo est ainsi le récit d’un éternel recommencement, une exploration de salles et de corridors toujours plus complexes où les ennemis se multiplient et deviennent, parfois par la force des choses, plus intelligents.
Se pose alors un dilemme cornélien: faut-il agir le plus rapidement possible en pleine lumière, quitte à se compliquer la tâche par la suite, ou faut-il demeurer immobile, en profitant des périodes d’obscurité pour surprendre les copies?
« L’ennemi, c’est vous », peut-on lire dans la description du jeu. Et à travers ces décors magnifique, avec ces musique atmosphérique prenante, avec cette utilisation particulièrement réussie de l’environnement visuel et sonore – y compris lorsqu’est venu le temps de concevoir l’interface de jeu, Echo propose une exploration du soi, de sa psyché, une réflexion portant davantage sur ce qui entoure ce palais planétaire, ce qui a mené à sa création, plutôt que sur le palais lui-même.
Echo n’est pas parfait; la mécanique de l’adaptation aux gestes du joueur est fort intéressante, mais les développeurs ont volontairement restreint les options offertes lorsque vient le temps de planifier ses mouvements ou d’agir sur l’environnement. On a l’impression que les possibilités et la liberté d’action auraient pu être plus importantes, mais que l’on s’est limité par manque de ressources, ou de temps.
Malgré tout, Echo est un très bon titre, d’autant plus qu’il s’agit du tout premier jeu du studio. Rose Leslie (Game of Thrones) réussit clairement à donner vie au personnage d’En, et ce même en tenant compte du fait que toutes les émotions doivent passer uniquement par la voix, puisque l’on ne voit pratiquement jamais le visage de la protagoniste.
Ballon d’essai intriguant, réussite visuelle autant que sonore, Echo mérite autant d’heures que l’on est en mesure d’y consacrer.