Luc Picard, en plus d’être une tête d’affiche importante dans le cinéma québécois, a également revigoré notre cinéma à plus d’une reprise en tant que réalisateur. Malheureusement, nul coup de poing n’a été aussi frappant que son sincère L’audition. Plus d’une décennie plus tard, en plus d’être foncièrement risible à plus d’un niveau, Les rois mongols sent davantage l’opportunisme à plein nez au lieu d’être une œuvre aussi sentie qu’elle se le laisse croire.
La crise d’Octobre continue encore d’être l’un des événements les plus bouleversants de notre histoire et il est difficile de ne pas s’y sentir concernés lorsqu’on en fait mention. Luc Picard le sait bien, lui qui a participé à de nombreux films de Falardeau. Malheureusement, sa version des faits, à hauteur d’enfants, n’a aucunement l’étoffe de son mentor et se montre aussi maladroite que ses adaptations des contes de Fred Pellerin.
Peut-être que le roman de Nicole Bélanger fonctionne très bien, mais en long-métrage, les invraisemblances se suivent, tout comme les incohérences, et il s’avère difficile de s’attacher à qui que ce soit, peu importe à quel point le film voudrait bien être mignon. Il faut admettre qu’il s’agit d’un premier scénario pour l’auteure de nombreux romans et que la technique n’est définitivement pas la même (ses autres projets cinématographiques n’ont pas encore abouti; sinon, elle a surtout fait de la télévision), mais c’est encore plus brouillon lorsqu’on réalise que la mise en scène de Picard est aussi impersonnelle, en plus d’être doublé d’un visuel vieillot particulièrement atroce et hideux pour le regard.
Il en va de même pour l’humour, censé être là pour détendre la lourde atmosphère, mais qui tombe constamment à plat, pendant que le trio responsable de la très jolie trame sonore de Camion se retrouve avec des compositions génériques qui ne représentent certainement pas toute l’étendue de leur talent.
Le film raconte donc l’histoire de jeunes qui décident de se prendre en main lorsqu’ils se sentent délaissés par les adultes et s’inspirent des coups du FLQ pour faire comprendre leur point. Ici, Manon et Mimi veulent éviter les familles d’accueil face à la mort imminente de leur père. S’en suit alors le kidnapping d’une vieille dame supposément importante qui devrait les pousser, selon leurs croyances, à obtenir ce qu’ils désirent, à revendiquer leurs droits.
Cependant, le film ne va jamais dans le vif du sujet. Il s’aventure en surface dans le conflit, utilise des archives faciles et des mentions clés pour faire réagir sans se donner la peine de poser des questions intéressantes ou d’apporter des réflexions nécessaires. On comprend que tout ceci est pour laisser la place aux enfants, à leur vision et leur confusion d’un monde en plein changement et plein d’incertitudes (la métaphore du coming-of-age autant à l’interne qu’à l’externe, bien sûr), mais en plus d’incestes et de beaucoup d’entêtement, il est dur d’adhérer à ses jeunes comédiens mal dirigés qui poussent la note autant que la pourtant excellente Sophie Cadieux qui se ramasse avec un accent douteux une phrase sur deux.
Ainsi, Les rois mongols s’étirent et s’étirent en se tirant constamment dans le pied en voulant émouvoir et toucher de la manière la plus rassembleuse possible. On croit à son potentiel de crowd-pleaser, à ses manières maladroites d’unir et de pardonner, mais on croit aussi à sa manière malsaine de s’en remettre à la nostalgie naïve de ses spectateurs ce qui est aussi impardonnable que le médiocre Paul à Québec qui vantait sa facilité pour une réussite.
Toutefois, rien n’égalera le summum du ridicule lors de son épilogue, totalement raté, qui s’appropriera un passage hors contexte d’une chanson d’Harmonium essentielle à notre culture, pour appuyer avec les plus gros traits du monde le message que le film nous martèle constamment au visage, ce, depuis son tout début.
4/10
Les rois mongols prend l’affiche en salles ce vendredi 22 septembre.