L’Écosse, 1947. À peine sortie de la Deuxième Guerre mondiale, le pays peine toujours à se remettre des bombardements et du coût matériel, économique et humain du conflit. À travers cette désolation et un hiver cruel, l’ex-policier devenu journaliste Douglas Brodie tentera de faire la lumière sur une sinistre Filière écossaise…
Déjà connu au moment de lire Les justiciers de Glasgow, paru l’an dernier aux éditions du Seuil, La filière écossaise représente le troisième volume d’une quadrilogie écrite par Gordon Ferris, et mettant en vedette cet ancien soldat devant s’adapter à la nouvelle réalité de l’après-guerre. Si le précédent volume avait vu Brodie devenir journaliste pour enquêter sur un gang d’Écossais désireux de se faire justice eux-mêmes face à des pouvoirs publics en perte de vitesse et de repères, voilà qu’il remet plutôt, cette fois, son chapeau de détective.
Certains de ses amis de la communauté juive écossaise s’arrogent en effet ses services pour tirer au clair une affaire de vols de bijoux. Brodie finira en fait par découvrir, par la bande, une réalité bien plus terrifiante; pourchassés par les Alliés et les Soviétiques, des dirigeants nazis, y compris des responsables ayant travaillé dans des camps de concentration, ont transité ou ont trouvé refuge en Écosse, dans l’espoir, éventuellement, de rejoindre l’Amérique du Nord ou l’Amérique du Sud.
S’ensuivra alors une chasse à l’homme en Grande-Bretagne, mais aussi en Allemagne occupée, pendant que se déroulent les procès des criminels de guerre nazis. Le tout dans une ambiance de salon mortuaire; fatigué, taraudé par ce qui ressemble fort à un syndrome de stress post-traumatique, Brodie n’est plus que l’ombre de lui-même. De nouveau confronté à l’impensable et au pire de la nature humaine (il avait déjà interrogé des génocidaires nazis après la guerre), le voilà qui titube, parvient à peine à terminer la journée avant de s’effondrer et de passer une nuit remplie de cauchemars qui le laissent épuisé, trempé de sueur et toujours plus dépressif.
La filière écossaise n’est pas un roman joyeux, loin de là. Mais avec ce troisième opus, Gordon Ferris se positionne certainement comme un auteur très important, l’un de ceux qui osent fouiller la vase où l’on retrouve la lie de l’humanité, histoire d’en tirer quelque chose méritant potentiellement d’être sauvé.