Le cavalier de St-Urbain, de Mordecai Richler, est la quatrième traduction récente des œuvres de fiction du romancier montréalais, réalisée par Lori St-Martin et Paul Gagné, pour les éditions Boréal. Publié d’abord en anglais, en 1971, c’est à l’automne 2016 qu’il revient sur les tablettes dans un nouvelle traduction.
Connu pour avoir dépeint les Québécois francophones en des termes que certains ont qualifiés de méprisants, Richler, dans ce roman, n’est pas plus indulgent avec les Canadiens anglais ou encore avec les Juifs de sa communauté. En fait, même s’il est parfois tendre avec certains de ses personnages, Mordecai Richler s’emploie à présenter tout un chacun sous l’angle de leurs travers. Petitesse d’esprit, délinquance, perversions, avarice, tout y passe dans ce récit qui dépeint le parcours semé de contradictions de Jake, metteur en scène de talent et fan de sa propre invention, le cavalier de St-Urbain.
Dans un style incisif et efficace, l’auteur nous raconte comment Jake en est venu, sur fond d’admiration pour un de ses cousins, à lui inventer une personnalité fantomatique, une personnalité idéalisée. Ce cousin qui cause des ennuis à presque toute sa famille, et surtout à Jake, le personnage principal qui n’aura de cesse de tenter de le retrouver, comme si le sens de sa vie en dépendait.
Pas de douceur, dans cette histoire, peu de gentillesse, mais une trame solide qui donne envie d’aller jusqu’au bout de ces 560 pages sans suspense. Quelques morceaux de choix, aussi, comme cette description d’un match de balle molle amical où toute la politicaillerie et les bas enjeux du monde de la télévision et du cinéma sont étalés devant le lecteur dans une longue tirade tragi-comique digne d’anthologie.
Pour tout lecteur friand de cynisme et qui sait apprécier une caricature sans pitié, Le cavalier de St-Urbain est un incontournable.