Fébrilement attendue, histoire de voir comment Netflix allait gérer sa série phare, alors que la réalité politique à Washington a dépassé la fiction qu’on y créait depuis quatre ans, déjà, la cinquième saison de la télésérie House of Cards marque un point tournant dans l’existence de l’oeuvre. Ce faisant, elle ne réussit toutefois pas à éviter les travers des dernières années.
Une présidence gangrenée par la corruption. Un chef d’État s’adonnant allègrement au népotisme. Une tendance maladive à déformer la vérité. Et, parallèlement à cela, une cinquième saison de House of Cards. Si le gag est facile, alors que l’accident de voiture qu’est l’administration Trump, aux États-Unis, n’en finit plus de se dérouler au compte-gouttes, comme si la planète vivait au ralenti, tous se demandaient comment les scénaristes de l’ultrapopulaire télésérie allaient s’adapter aux nombreuses transformations de la scène politique au pays de l’Oncle Sam.
Manipulations, mensonges, tensions… cette cinquième saison s’ouvre sur la fin de la course électorale entre les Underwoods, désormais candidats à la présidence et à la vice-présidence, et Will Conway, républicain bon teint flanqué du taciturne général Brockhart. Si la bande-annonce donnait l’impression que les nouveaux épisodes tourneraient justement autour de cette élection, et si plusieurs d’entre eux concernent effectivement la course à la Maison-Blanche, le fait que l’actrice jouant le rôle de Claire Underwood, Robin Wright, ait récemment parlé du scénario de la sixième saison de la série est suffisant pour que le téléspectateur moyen comprenne qu’il n’y aura pas de républicains à court terme dans la Maison-Blanche. Il s’agissait bien de la première fois, d’ailleurs, où l’on aimerait voter contre les démocrates…
Au fait, le couple Underwood est-il encore démocrate? Quand on pourchasse le pouvoir dans le seul but de l’obtenir, quand tout ce qui compte est la survie, quand Sun Tzu et Machiavel semblent demeurer en permanence sur la table de chevet du chef de l’État, quand un programme politique ne sert plus qu’à aller chercher des votes, quand on est prêt à tout, même déclencher une guerre ou gonfler une menace terroriste, et ce non pas pour gagner, mais pour écraser l’adversaire, a-t-on encore une affiliation politique?
Tout cela est bien beau, mais on ne trouve rien de bien nouveau sous le soleil de cette cinquième déclinaison des machinations politiques de Kevin Spacey et de Robin Wright. Après tout, ces thèmes sont exploités depuis le premier épisode de la série; seuls les enjeux et quelques acteurs ont changé au fil du temps. Les scénaristes continuent de tenter d’inclure des faits réels dans le déroulement des épisodes, y compris, cette fois, la guerre civile en Syrie et les fuites orchestrées par Edward Snowden et WikiLeaks, mais la sauce ne prend pas. On se doute bien que les producteurs ne tueront pas leur vache à lait télévisuelle, et feront donc en sorte que nos antihéros réussiront à se tirer d’affaire pendant encore 13 épisodes, et ce malgré le travail acharné de leurs adversaires politiques et journalistiques. Le ton continue de s’assombrir alors que, paradoxalement, les cheveux de Frank Underwood blanchissent, mais on continue de ressentir cette frustration devant les tours de passe-passe et les circonstances faisant en sorte que l’épée de Damoclès évite évidemment le crâne de nos protagonistes, pour plutôt aller se ficher dans la tête d’un personnage secondaire.
Il est probablement temps que Netflix en finisse avec House of Cards: après les poignards dans le dos, après les assassinats, au propre comme au figuré, après tant d’adversaires trop brièvement esquissés pour représenter une véritable menace, que reste-t-il à dire? Bien peu de choses.
Un commentaire
Pingback: House of Cards, saison 6: la deuxième saison de trop