Dans le monde des appareils électroniques, où tous sont constamment à la recherche d’objets plus petits, plus rapides et à l’autonomie énergétique illimitée, les isolateurs topologiques (TI) offrent un fantastique potentiel, affirment des chercheurs.
Dans une étude devant être publié dans Science Advances en juin, Jing Shi, un professeur de physique et d’astronomie à l’Université de Californie à Riverside, et des collègues du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et de l’Université d’État de l’Arizona indiquent qu’ils ont créé un film TI d’à peine 25 atomes d’épais qui adhère à un film magnétique isolant, ce qui crée une « hétérostructure ». Cette hétérostructure fait en sorte que les surfaces couvertes de TI possèdent des propriétés magnétiques à température pièce, voire même jusqu’à 400 degrés Kelvin (environ 130 degrés Celsius).
Les surfaces TI ne sont épaisses que de quelques atomes et ont besoin de peu de puissance pour transporter l’électricité. Si ces surfaces sont rendues magnétiques, le courant ne circule que sur les côtés de tels appareils, ce qui nécessite encore moins d’énergie. En raison de ce qui est appelé effet Hall, une « anomalie quantique », un appareil possédant un TI pourrait être particulièrement petit, et la pile qui l’alimenterait durerait longtemps.
Les ingénieurs apprécient particulièrement cet effet Hall, puisque cela fait en sorte que les appareils sont plus robustes, et donc capables de fonctionner malgré des défectuosités ou des erreurs, ce qui fait en sorte qu’une application fautive, par exemple, ne ferait pas « planter » un système d’exploitation dans son ensemble.
Les isolateurs topologiques sont les seuls matériaux, pour l’instant, qui peuvent parvenir à créer l’effet Hall tant recherché, mais seulement après avoir été magnétisés. Et c’est là que se situe le problème: les surfaces TI ne sont pas magnétiques à l’état naturel.
Les scientifiques ont été en mesure de magnétiser ces surfaces en utilisant le « dopage », soit l’introduction d’impuretés magnétiques dans le matériau, ce qui rend aussi l’ensemble moins stable, mentionne M. Shi. Ce dopage permet aux surfaces TI de créer l’effet Hall, mais seulement à des températures extrêmement basses, soit à quelques centièmes de degré Kelvin au-dessus du zéro absolu (soit près de – 274 degrés Celsius), ce qui n’est pas particulièrement utile lorsqu’il est question d’en populariser l’usage.
Plusieurs scientifiques blâment le dopage comme facteur faisant en sorte que l’effet Hall ne se produise qu’à de très basses températures, poursuit M. Shi, une situation qui a poussé les experts à chercher une autre technique pour magnétiser les surfaces TI.
Voilà où le SHINES, le Spins and Heat in Nanoscale Electronic Systems, de l’Université de Californie à Riverside, entre en jeu. En 2015, ce laboratoire dirigé par M. Shi a créé des hétérostructures composées de films magnétiques et d’une couche de graphène d’un atome d’épaisseur en utilisant une technique appelée épitaxie par rayon laser moléculaire.
Une fois cette étape franchie, le laboratoire a fait parvenir les matériaux aux collaborateurs du MIT, qui ont ensuite construit des couches atomiques de TI au-dessus des couches magnétisées, créant les hétérostructures, qui ont par après été renvoyées en Californie pour fabriquer les appareils et effectuer des tests.
Des travaux supplémentaires sont nécessaires pour faire en sorte que les TI produisent l’effet Hall à des températures élevées, avant de rendre les matériaux disponibles pour miniaturisation et ensuite inclusion dans des appareils électroniques, indique M. Shi, mais les résultats en laboratoire démontrent qu’en choisissant l’approche des hétérostructures, les surfaces TI peuvent être magnétisées – et robustes – à des températures normales.
« Il y a encore beaucoup de travail à faire. Ces percées ne se font pas toutes seules », conclut le chercheur.