« Fourre-là dans l’cul! » Le ton est donné dans les premières minutes de la pièce Baby-Sitter, présentée sur les planches de La Licorne. Adaptée du triste phénomène consistant à crier « Fuck her right in the pussy » en passant devant des journalistes en direct, l’oeuvre de l’auteure Catherine Léger tire à bout portant sur la misogynie et les rapports de force entre les sexes.
Cédric (David Boutin), suspendu par Hydro-Québec après avoir asséné ladite phrase, s’engagera bien malgré lui sur le chemin d’une certaine rédemption, aidé en ce sens par son frère Jean-Michel (Steve Laplante), toujours prêt à défendre la veuve et l’orpheline.
De l’autre côté, on trouve Nadine (Isabelle Brouillette), nouvelle maman et nouvellement (on imagine) déprimée post-partum. Entre Nadine et le duo de pseudo chevaliers servants en quête de damoiselles en détresse s’installe une étrange atmosphère, où le semblant de féminisme naissant des uns télescope l’écoeurantite aigüe de l’autre. Et lorsque débarque la gardienne – oups, pardon, la baby-sitter, la jeune Émy, toute en courbes et en innocence feinte, nos deux larrons ne savent plus trop où donner de la tête.
Les spectateur ont un peu de difficulté à suivre, eux aussi. Car ce qui aurait pu être une bonne comédie grinçante sur le sexisme, doublée d’une histoire de rédemption et de cheminement personnel prend des allures de foire d’empoigne verbalo-théâtrale, alors que les coups fusent de part et d’autre, et que nos deux « héros » finissent plutôt par être les dindons de la farce. Ils veulent probablement bien faire, mais en tentant de tout englober et de généraliser le problème de la misogynie, finissent par viser franchement beaucoup trop large et tombent dans les banalités, voire les énormités. Ça riait, dans la salle, mais ça riait souvent jaune, aussi…
À mi-chemin entre la réflexion sincère, le déboulonnage des mythes, le coup de gueule et la foire d’empoigne, Baby-Sitter rate quelques coups, mais multiplie tant les tirs que la plupart finissent par faire mouche. On serait bien en peine, néanmoins, d’en tirer une quelconque morale. D’un autre côté, on ne va pas toujours au théâtre pour en sortir grandi sur le plan intellectuel, ou pour se faire transmettre la Vérité avec un v majuscule. Parfois, on a besoin de rire un bon coup, de donner quelques coups de pied dans la fourmilière métaphorique pour faire bouger les choses en tous sens. Casser quelque chose avec un dildo à la taille un peu intimidante accroché entre les jambes. Littéralement.
Baby-Sitter, une pièce de Catherine Léger, mise en scène de Philippe Lambert. Avec David Boutin, Isabelle Brouillette, Victoria Diamond et Steve Laplante. Jouée à La Licorne jusqu’au 10 mai 2017.
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