Sous un soleil printanier, une écrivaine et un poète s’apprêtent à réinventer la ville. Dans le cadre de la série d’événements Possibles, qui soulignent le 375 anniversaire de Montréal en permettant aux publics et aux artistes de se projeter 25 ans dans le futur, Maude Nepveu-Villeneuve et Shawn Cotton se penchent sur le thème de la santé et de la qualité de vie dans la métropole.
« Nous n’avons pas travaillé ensemble, Shawn Cotton et moi, mais on a plutôt écrit séparément, puisque Shawn fait de la poésie, et moi je vais de la fiction narrée », commence tout de go Mme Nepveu-Villeneuve, installée dans un café du quartier Villeray.
« Nous nous sommes rencontrés tout près d’ici, en compagnie de Pascal-Angelo Fioramore, qui est l’éditeur chez Rodrigol, une petite maison de publication indépendante, et qui s’occupe aussi d’organiser l’événement Expozine (un événement annuel rassemblant des amateurs de livres, de bandes dessinées et de magazines). C’est lui le producteur du projet, et il nous a sollicités, Shawn et moi, parce qu’il trouvait que nous avions des styles et des façons de travailler différents, et que nous pourrions aborder le thème de façon différente. »
« Ce qui nous intéressait, comme point de départ pour notre oeuvre, c’est l’accès au fleuve. Parce que nous trouvions qu’en tant que Montréalais, cet aspect est un peu absent. Si Shawn allait se baigner dans le coin de Pointe-aux-Trembles, dans des endroits un peu cachés, moi j’avais la Rivière des Prairies, près du Mont-Saint-Louis (où elle a effectuée ses études secondaires, ndlr), nous trouvions que les berges, qu’il s’agisse de la rivière ou du fleuve, n’étaient pas très accessibles, alors qu’on vit sur une île, et que ça devrait faire davantage partie de nos vies. »
« Voilà donc ce qui nous intéressait, poursuit la femme dans la trentaine, et cela touchait plus d’un thème abordé dans le cadre des consultations publiques précédant le début de la série des 12 oeuvres mensuelles de Possibles. En fait, ça se trouvait dans « Écologie » et dans « Santé et qualité de vie »; nous avons finalement hérité de ce dernier thème. »
L’auteure a « essayé de commencer avec une narrative non-fiction, mais cela ne fonctionnait pas, je bloquais… J’avais plein d’idées, mais pas de fil conducteur. Puis mon père m’a parlé du moment où il est allé faire du kayak autour de l’Île-des-Soeurs et s’est retrouvé à rencontrer le chantier du nouveau Pont Champlain. Il a heurté une bouée, a chaviré, et a pensé mourir. Il s’en est sorti, mais je trouvais que cela symbolisait bien la place que nous n’accordons pas aux citoyens sur le fleuve; ce qui compte, ce sont les gros navires transportant des conteneurs qui vont engranger de l’argent. Les gens ordinaires qui veulent avoir accès au fleuve se « font tasser ». »
La démarche de Mme Nepveu-Villeneuve et de M. Cotton, et comme en fait de l’ensemble des artistes retenus pour les 12 oeuvres de la série Possibles, n’en est pas une de revendication, mais plutôt une d’utopie. Si la question de l’accès aux berges recoupe des démarches politiques entre autres entreprises par la formation Projet Montréal, l’auteure assure que sa démarche est apolitique. Cela ne veut toutefois pas dire que cette quatrième déclinaison des Possibles ne fait pas appel à des faits réels. « Il a fallu que j’aille à Barcelone pour comprendre de quelle façon on peut repenser la ville pour redonner accès aux berges. J’ai longtemps pensé que c’était normal, à Montréal, que le fleuve ne soit pas accessible aux citoyens », dit-elle.
L’oeuvre commune de l’auteure et du poète, présentée sous la forme d’un livre doublé d’un recueil de poèmes, sera présentée jeudi 20 avril au bistro culturel de l’Espace La Fontaine, dans le parc du même nom. Et attention pour ceux qui espèrent pouvoir acheter l’oeuvre par la suite: celle-ci sera distribuée gratuitement lors de l’événement, mais son existence sera éphémère. Mieux vaut donc arriver tôt!