Afin d’avoir une bonne chance de respecter les limites établies par l’Accord de Paris sur le climat, il sera nécessaire de non seulement réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de conserver les puits de carbone, les émissions polluantes devant impérativement atteindre leur pic d’ici les 10 prochaines années, selon une nouvelle étude.
La concentration de dioxyde carbone (CO2) et d’autres gaz à effet de serre peut être réduite de deux façons – en réduisant les émissions, ou retirant ces gaz de l’atmosphère, par exemple via les plantes, l’océan et le sol.
Les Accords historiques de Paris établissent une cible visant à limiter la hausse mondiale moyenne des températures sous 2 degrés Celsius, et encouragent à viser un plafond de 1,5 degré sous le niveau pré-industriel. Toutefois, le calendrier des efforts en ce sens – et même les détails des efforts en question – sont laissés à la discrétion des pays.
Dans une nouvelle étude publiée dans Nature Communications, des chercheurs de l’International Institute for Applied Systems Analysis ont employé un modèle mondiale du système carbone qui tient compte du relâchement du CO2 et des émissions via les activités naturelles et d’origine humaine.
« L’étude démontre que les systèmes combinés touchant à l’énergie et à l’utilisation des terres devraient mener à des émissions nulles avant 2040 pour s’assurer de la possibilité d’atteindre la cible de 1,5 degré Celsius d’ici 2100 », indique Michael Obersteiner, coauteur de l’étude.
Toujours selon cette recherche, la consommation de combustibles fossiles devra fort probablement être réduite à moins de 25% du cocktail énergétique mondial d’ici 2100, comparativement à 95% aujourd’hui. Au même moment, la modification de l’utilisation des terres, comme la déforestation, doit être réduite. Cela mènerait à une baisse de 42% des émissions cumulatives d’ici la fin du siècle, comparativement à un scénario de maintien des activités.
« Cette étude fournit un aperçu du CO2 dans notre atmosphère, des endroits d’où il provient et des endroits où il se rend. Nous prenons compte non seulement des émissions des combustibles fossiles, mais également de l’agriculture, de l’utilisation des terres, de la production alimentaire, de la bioénergie et des dégagements de carbone par les écosystèmes naturels », explique Brian Walsh, consultant de la Banque mondiale, qui était en charge de l’étude.
Le document se penche sur quatre scénarios pour le futur développement énergétique, avec un cocktail mélangeant énergie renouvelable et combustibles fossiles. Dans une perspective s’appuyant « très largement » sur l’énergie verte, la production solaire, éolienne et s’appuyant sur la bioénergie augmenterait d’environ 5% par année, et les émissions polluantes atteindraient leur pic vers 2022, mentionne l’étude. Mais en l’absence de technologies solides aux émissions négatives, cette perspective mènerait malgré tout à une hausse mondiale des températures de 2,5 degrés, ratant du même coup les objectifs de l’Accord de Paris.
M. Walsh note que le scénario s’appuyant très fortement sur les énergies vertes est ambitieux, mais pas impossible – la production mondiale d’énergie verte a cru de 2,6% entre 2013 et 2014. Si l’économie mondiale continue plutôt de consommer des combustibles fossiles (avec une croissance de 2 à 3% par année), le réchauffement atteindrait plutôt 3,5 degrés Celsius d’ici la fin du siècle.
Pour les auteurs, il est important de faire attention au cocktail énergétique, mais aussi à la quantité d’énergie consommée. « De précédentes études de l’IIASA abordent les questions de la réduction de la demande, de l’efficacité énergétique, de la conservation de l’énergie et des changements comportementaux. Si nous remportons des victoires dans ces domaines, cela pourrait signifier la différence entre une hausse de 1,5 degré et une autre de 2 degrés », lance Keywan Riahi, directeur du Programme sur l’énergie de l’IIASA, qui a également contribué à l’étude.