C’est peut-être par pur hasard ou dans un clin d’œil du destin pour passer le flambeau, mais c’est sous la pluie mardi matin qu’a été dévoilé aux médias Volta, la plus récente création sous chapiteau du Cirque du Soleil, prenant l’affiche moins d’un an après Luzia, qui était, on le rappelle, la première production en tournée à incorporer l’eau au sein même du spectacle.
Est-ce trop ambitieux, voire rapide, de viser un nouveau spectacle par année? Peut-être. Pourtant, ce n’est pas les défis qui arrêteront l’équipe derrière cette nouvelle production, la 41e, puisque les idées s’enchaînent et un sens du renouveau et du grandiose se ressent dans chaque parcelle de Volta qui est en branle depuis environ deux ans.
Histoire d’inverser le cycle, après avoir transformé de nombreux spectacles de chapiteau pour des versions d’arénas, voilà qu’on a visiblement envie ici de donner l’expérience immersive et grandiloquente des arénas sous chapiteau. Décris comme un pari créatif qui veut miser sur l’inusité, c’est avec une approche moderne et urbaine qui incorpore le même désir narratif de liberté, qu’on veuille agrandir les horizons des spectateurs et continuer de leur en mettre plein la vue avec du jamais vu.
https://www.youtube.com/watch?v=3D5ez8kEx3U
Certes, concrètement, cela semble encore assez difficile de décrire Volta. On parle de « l’histoire universelle de la connaissance de soi et de la recherche de son propre génie », tout comme de thèmes et désirs aussi rassembleurs que le dépassement de ses propres peurs et la création d’un monde meilleur avec les gens autour de nous.
Néanmoins, sous la fébrilité de l’équipe, principalement du duo créatif formé de Bastien Alexandre (auteur et metteur en scène) et Jean Guibert (directeur de création), collaborateurs depuis près de cinq ans, et membres du cirque depuis une bonne décennie, trois numéros choisis sur le volet et sans fil conducteur ont été présentés aux médias sur place lors de la conférence de presse. Si la beauté et la portée furent indéniables, il n’y eut pas nécessairement de souffles coupés, ne serait-ce que pour quelques acrobaties assez poussées dans l’esquisse du numéro final qui se produit avec des BMX.
Narrativement chaotique, cela prend près d’une dizaine de pages pour décrire l’histoire, les personnages, les thèmes, les idées et les scènes du spectacle, alors que son créateur a découlé de notre réalité un microcosme plutôt complexe pour donner naissance à son univers. Il faudra donc voir à quel point ce désir assez cinématographique de raconter les choses se traduira dans le spectacle en ensemble, mais pour l’instant, on est assez inspiré par la motivation de ses multiples créateurs issus de milieux différents, parmi lesquels on retrouve Anthony Gonzalez à la musique, l’homme derrière le réputé groupe M83, reconnu pour son électro-pop-rock orchestral, ainsi que le scénographe Bruce Rodgers qui a travaillé pour nul autre que Jay Z, Kanye West et Madonna, en plus d’avoir fait une dizaine de Super Bowl, tous deux experts dans leur domaine, mais novice pour ce qui est du cirque.
Les deux, rencontrés exclusivement pour l’occasion, trouvent d’ailleurs leur plus gros défi en termes de contraintes, l’un de par le côté aussi calculé qu’imprévisible du mouvement qu’il doit accompagner, habituellement plus libre dans l’interprétation de ses propres pièces, et l’autre dans l’espace, trouvant ici son espace le plus restreint à ce jour. Gonzalez, qui avait composé la musique du film Oblivion il y a quelques années, ne cache d’ailleurs par ses craintes derrière son excitation évidente: « Le cinéma c’est facile à côté du Cirque du Soleil », lance-t-il en riant sans hésiter. De son côté, Rodgers est fasciné par l’ampleur du travail: « J’ai collaboré à tant de bons spectacles en trente ans et j’ai toujours voulu travailler avec le cirque et maintenant que j’y suis, le calibre est complètement différent. Je ne dicte pas tout, au contraire, je dois tout créer en harmonie avec tous les départements et m’assurer de garder le rythme. »
À eux s’ajoutent également quarante-six artistes de partout à travers le globe, faisant de Volta l’une des productions les plus multiculturelles à ce jour. Ces derniers apporteront leur propre âme dans les nombreuses disciplines qui ne manquent pas de faire grandir l’intrigue quant au résultat final. Si l’on peut se faire une belle idée du patin à quatre roues, de la corde et du bungee, on est beaucoup plus curieux quant à la façon dont ils s’y prendront pour recréer les parcours et, surtout, le numéro de suspension par les cheveux!
Visuellement chargée, cette création tentera de délimiter de nouvelles balises et de donner un nouveau sens aux possibilités d’un spectacle de cirque sous chapiteau. En misant sur l’aventure et les sports d’action et de l’extrême, en accordant plus de profondeur à la scène, en utilisant les éclairages différemment, en multipliant les projections vidéos et en usant de la danse et de la musique comme moteurs créatifs, plusieurs habitués risquent d’avoir tout un choc avec cette nouvelle proposition. Une fois de plus, un rendez-vous qu’on ne voudra pas manquer!
Volta débute sa tournée sous le Grand Chapiteau dans le Vieux-Port de Montréal dès le 20 avril prochain. Il prendra ensuite son envol pour Gatineau dès le 3 août, et le reste du monde par la suite.
Photos: Jim Chartrand / Pieuvre.ca