C’est la nouvelle tendance chez les commentateurs politiques, on parle constamment de fusion. On en entend parler à toutes les sauces pour tous les partis. Cela force souvent ceux-ci à se prononcer sur une question qu’ils ne se posaient même pas. Mais pour Québec solidaire, l’éventualité de fusionner avec Option nationale semble avoir été prise au sérieux.
On apprenait ainsi récemment que les solidaires allaient débattre de la question lors de leur congrès en mai. Pour sa part, Option nationale tiendra un congrès en avril, mais n’a pas l’intention d’aborder la question.
Qui gagne quoi
Il faudrait être naïf pour penser qu’une fusion de partis politiques se fait à la légère. C’est une solution qui peut être hautement risquée. Bien que pour plusieurs observateurs, cette fusion peut sembler naturelle, j’ai bien de la difficulté à voir les avantages significatifs pour les deux organisations concernées.
Automatiquement, on se dit qu’en ne faisant qu’un avec ON, les solidaires élimineraient ainsi un adversaire politique lors du scrutin. Mais est-ce qu’Option nationale est réellement un adversaire politique significatif? Il ne faut pas se leurrer, ce n’est pas le presque 1% de voix remportées par ON qui aidera réellement à l’élection d’un candidat solidaire. Bien que les militants d’ON aiment bien se dire qu’ils représentent une base électorale importante et qu’ipso facto leur parti mérite beaucoup plus d’attention médiatique, factuellement, c’est faux.
C’est certain, avec la nouvelle loi sur le financement des partis politiques, chaque vote compte. Mais reste encore à savoir combien de votes seraient réellement transférés. Plusieurs regardent les résultats des scrutins en se disant: le parti X a eu 30 et le parti Y 20, donc ensemble ils auraient 50. Parfait. Mais c’est faux. Le calcul n’est pas aussi simple. Il ne faut pas sous-estimer la rancœur de l’électeur froissée par un mariage forcé.
Il faut être réaliste: le parti survivant de cette fusion sera Québec solidaire. Option nationale aurait voulu être à la place de QS qui, dès 2012, effectuait une percée significative. Mais ce destin semble maintenant invraisemblable. Visiblement, la fusion serait la façon pour Option nationale de se négocier une fin digne. Les onistes ne réussissent pas à tirer leur épingle du jeu, ni en termes de membres, ni en termes de votes, ni en termes de financement. Ils auraient beau tenter de faire toutes les vidéos «virales» que YouTube peut contenir, vient un moment où il faut se rendre à l’évidence: le parti va disparaître. Tant qu’à mourir dans l’oubli, ils tentent de faire passer un agenda souverainiste pressé au travers de la gorge des militants solidaires avant de se dissoudre. L’adoption par Québec solidaire d’un agenda indépendantiste plus dur et pressé pourrait par contre leur faire perdre des appuis. Il ne faut pas oublier qu’ils rallient plusieurs souverainistes mous et même certains fédéralistes qui votent d’abord pour des idéaux de justice sociale.
Rallier les militants récalcitrants
Ce sont les militants qui risquent de nuire le plus au bon déroulement de la fusion. Les mariages réussis en politique incluent souvent deux partis qui n’ont pas vécu longtemps comme adversaires dans la même arène politique. Ce cas-ci est donc particulièrement délicat. Malheureusement, quand un grand mouvement se subdivise, les membres des différents groupes se voient l’un l’autre comme des pires ennemis. Ils deviennent obsédés par la division du vote. Pour chacun, son parti est LE vaisseau qui mènera au but ultime. Les attaques les plus féroces des militants d’ON sont souvent dirigées vers QS et vers le PQ, leurs alliés naturels. On demande maintenant à ces mêmes militants de former une belle grande famille avec ceux qui ont volé leurs votes et leur attention médiatique depuis six ans maintenant.
Il reste encore plusieurs obstacles à surmonter avant que cette union se fasse, et le plus grand de ceux-ci est peut-être un bon vieux calcul coûts-bénéfices.
Un commentaire
L’auteure est-elle membre d’Option nationale? Elle semble fichtrement bien informée sur ce que les militants veulent et pensent.
(En fait non. Pas du tout.)