Artiste visuel à la démarche résolument souverainiste, Simon Beaudry part de la capitale de la province et s’envole pour l’Écosse, deux semaines avant le référendum sur l’indépendance tenu là-bas en 2015. Cette visite, présentée sous la forme d’un road trip, est racontée dans le documentaire Yes, présenté dans le cadre des 35e Rendez-vous du cinéma québécois.
Dans une salle remplie du gratin souverainiste du Québec (le chef d’Option nationale et son prédécesseur, des députés du PQ, de Québec solidaire, du Bloc québécois, et même l’ancien chef péquiste Pierre Karl Péladeau), le documentaire tourne principalement autour de la démarche artistique de M. Beaudry, démarche qui consiste à voyager de ville en ville, en Écosse, pour y exhiber un mélange des tenues traditionnelles écossaise et québécoise, un fleur-de-lysé remanié au bout des bras.
Quand il n’est pas occupé à défiler ainsi, l’artiste appose des slogans indépendantistes sur les murs et les chaussées, se méritant parfois des quolibets et les remontrances des autorités.
Si Yes offre un aperçu différent du processus référendaire écossais, vu par les yeux d’un artiste d’ici, il y a lieu de s’interroger sur le véritable objectif du long-métrage réalisé par Eric Piccoli et Félix Rose. Pas vraiment un road trip, pas vraiment un documentaire sur les enjeux référendaires, Yes semble constamment hésité, tiraillé entre deux identités. Le film parfait pour le Québécois moyen, probablement, mais il est assez ironique de constater que l’artiste lui-même ne semble pas savoir ce qu’il fait véritablement en terre écossaise. Si le mouvement indépendantiste québécois avait très fortement appuyé la cause du Oui à l’écossaise, et si certains enjeux semblent relativement similaires – principalement celui de la vigueur économique de l’éventuel nouveau pays -, peu de gens du cru semblaient comprendre pourquoi un Québécois débarquait, un étrange drapeau entre les mains, pour s’immiscer dans leur débat de société.
Dans une perspective cruellement représentative de la vision du nationalisme canadien et québécois, Beaudry effectue la majorité de ses performances artistiques au beau milieu de nulle part. Et lorsqu’il est en mesure d’entamer le dialogue avec des tenants du Oui ou du Non, la conversation est toujours très brève. On ne s’attendait pas à ce que Yes soit en fait une succession de politologues, historiens et économistes débattant de la validité de l’indépendance écossaise, mais lorsqu’un partisan du Non finit par offrir un début de réponse sensée à une question portant sur ses convictions politiques, l’homme est coupé manu militari. À croire que les deux solitudes n’est pas un concept unique au Canada…