Même s’il ne renie en rien son goût marqué pour la violence, l’histoire et sa fascination aux limites du fanatisme pour la religion, on ne s’attendait pas à un tel retour du controversé Mel Gibson avec cet Hacksaw Ridge, fascinant objet plutôt longuet qui se vaut un succès critique et populaire assez marqué. Sa sortie en DVD est l’occasion parfaite de l’attraper chez soi et d’essayer de comprendre sa place parmi les prestigieux candidats au Meilleur Film à la prochaine cérémonie des Oscars.
La prémisse en soi attire l’attention dans cet être humain dévoué qui veut réparer ses erreurs du passé en joignant les rangs de l’armée américaine pour sauver des vies au lieu d’en enlever. Mieux, le brillant Andrew Garfield continue d’épater avec une performance encore aux limites psychotiques qui réincarne la figure christique avec brio, projet personnel qu’il poussera encore davantage dans le mitigé, mais honorable Silence de Scorsese. Certes, il est auréolé d’une impressionnante distribution qu’on prend plaisir à reconnaître, comme Hugo Weaving, dans un rôle plus vénérable que dans The Dressmaker, son autre coproduction australienne récente, Sam Worthington ou même Vince Vaughn dans un contre-emploi qui impressionne.
Bien sûr, comme le scénario provient de deux habitués du petit écran, on peut sans mal reprocher son côté mélodramatique et sa longueur puisqu’avec ses deux heures vingt et sa première partie dont on aurait pu épargner plusieurs détails, on n’est jamais trop loin des élans télévisuels. Néanmoins, même si la réalisation de Gibson est loin d’être parmi ses plus ambitieuses avec son visuel particulièrement étrange et souvent trop rayonnant, on doit sauver la seconde partie puisque lorsqu’on s’amène sur le champ de bataille plus rien ne peut arrêter le film qui s’avère constamment palpitant.
La première immersion, dans cette impressionnante séquence qu’on n’a même pas le courage de chronométrer, a l’étoffe d’un grand moment de cinéma qui nous rive à notre siège avec passion. Avec ce sentiment de suivre le protagoniste dans tous ses dangers, grâce à une mise en scène chorégraphiée au quart de tour et un soin sonore et visuel au point, on finit presque par oublier les nombreux faux pas précédents (et à venir), notamment dans cette romance fleur bleue que la piètre Teresa Palmer ne parvient toujours pas élever avec ses tiques qui stagnent depuis le début de sa carrière.
Voilà donc un drame historique de guerre entre deux feux, qui intéresse par son histoire qui malgré une violence par moment difficile à regarder, fascine aussi par son approche qui nous réinvente un peu notre vision de concevoir le genre. Il est toutefois aussi un drame aux limites du pitoyable qui manque souvent de nous faire décrocher avant d’arriver au vif du sujet. Heureusement que Garfield, après The Social Network, le trop peu connu 99 Homes et bien sûr la franchise avortée, et mal-aimée à tort de The Amazing Spider-Man, depuis sa performance hypnotisante dans Boy A qui l’a sans conteste lancé, continue d’avoir tout ce qu’il faut pour porter enfin la totalité d’un film sur ses épaules, ayant tout le talent nécessaire pour être le héros avant-gardiste dont Hacksaw Ridge et ses spectateurs avaient tant besoin.
6/10
Hacksaw Ridge est disponible en DVD, Blu-Ray et Blu-Ray 4K depuis le 21 février dernier.