Ils étaient deux à se batailler pour un brevet, une bataille qui a assombri les nouvelles de la dernière année entourant la technologie de manipulations des gènes CRISPR. Le bureau des brevets a tranché, mais la bataille va se poursuivre ailleurs.
C’est l’Institut Broad, au Massachusetts, qui a « inventé » CRISPR, et non l’Université de Californie, selon la décision rendue le 15 février. Celle-ci permet en théorie à l’Institut, affilié à l’Université Harvard, de conserver les droits sur toute utilisation de la technologie, autant sur des humains que sur des animaux. CRISPR est cette technologie qui permet de manipuler des gènes avec une précision supérieure à tout ce qui existait auparavant, et qui commence déjà à faire son chemin vers la médecine. L’Université de Californie pointait la première publication décrivant cette technique, en 2012, et signée par la biochimiste Jennifer Doudna et la microbiologiste française Emmanuelle Charpentier, comme étant le point de départ de ce qui allait devenir la plus importante percée de la décennie en biologie. L’Institut Broad alléguait plutôt que la première publication démontrant la possibilité d’en tirer un usage pratique chez des animaux et des plantes, était celle de son chercheur Feng Zhang, en janvier 2013.
Loin d’être une simple dispute académique, la bataille est économique : les investissements dans la technologie depuis 2013 s’élèveraient à plus de 600 millions $, en dépit de cette incertitude sur le propriétaire du brevet. Un brevet peut avoir l’avantage de clarifier les choses pour les futurs investisseurs, mais aussi de ralentir la recherche, tout dépendant ce que l’Institut Broad exigera de ceux qui, à travers le monde, voudront utiliser CRISPR. Et l’Université de Californie peut encore aller en appel, un processus qui pourrait prendre une autre année, à moins que les deux institutions n’en arrivent à une entente.