Du rire aux relations sexuelles, il n’y a bien souvent que peu de pas. Parlez-en au cinéaste Fernand Dansereau, qui après s’être attaqué à l’humour chez les aînés, dans Le vieil âge et le rire, poursuit sa série de documentaires sur le troisième âge en proposant L’érotisme et le vieil âge.
Sujet tabou, la vie sexuelle des personnes âgées est pourtant bien présente. D’une façon souvent différente que chez les plus jeunes, sans doute, mais comme le répètent à l’envi les gens interrogés dans le cadre du film, ce n’est pas parce que l’on vieillit que le désir, la passion, l’amour et le sexe disparaissent d’un seul coup.
M. Dansereau, appartenant lui-même à ce « bel âge », questionne donc ses contemporains sur ce qui est traditionnellement considéré comme des activités de jeunes… et d’un peu moins jeunes. Si l’on peut sans trop de problème comprendre que les aînés vivent leur sensualité et leur sexualité, le public est agréablement surpris de l’ouverture et de la franchise des témoignages. Tout y passe: transformation du désir de performance en un désir de tendresse, complications de santé nuisant aux relations sexuelles, caresses, changements dans les relations amoureuses, prédominance grandissante de l’érotisme sur le pornographique… La sexualité chez les aînés est passablement complexe. Heureusement, d’ailleurs!
Après tout, cette sexualité à divers niveaux, cette sexualité profonde, complexe et possiblement complète n’est-elle pas ce vers quoi tous devraient tendre? En exposant un aspect à la fois tendre et fragile de la vie des aînés, Dansereau nous ramène à cette sexualité moderne tirée des PornHub et des RedTube de ce monde. Du sexe qui carbure au plastique, aux gémissements feints et à l’obsession d’y aller plus vite, plus fort, avec quantité de produits en latex ou en cuir. Existe-t-il un équilibre sain entre un désir des extrêmes et une envie de simples caresses amoureuses? Et comment faut-il réagir quand cette improbable harmonie est chamboulée par les dégâts de l’âge et de la maladie, ou par la mort?
Sans aller jusqu’à marteler qu’il est nécessaire de briser les tabous en ce domaine et de tenir une conversation nationale sur l’ablation forcée de la sexualité des aînés, L’érotisme et le vieil âge est un documentaire particulièrement touchant qui nous rappelle que le sexe, le désir font partie intégrante de la vie, et que si certaines notions qui y sont liées n’ont effectivement pas leur place dans l’espace public, la question mérite malgré tout d’être soulevée et creusée à chaque fois que cela est possible. Car sans érotisme, sans sensualité, sans amour, la vie est bien triste.