Via le tourisme de maternité ou par accident, les bébés nés aux États-Unis reçoivent automatiquement la nationalité américaine. Si certains y voient une multitude d’avantages, d’autres regrettent amèrement ce bonus imposé, rapporte le Monde diplomatique de janvier.
À l’hôtel Marmara Manhattan de la ville de New York, plus d’une douzaine de femmes enceintes et leur famille ont profité des forfaits de tourisme de maternité en 2011, rapporte la chaîne ABC en 2012. Le forfait inclut une chambre à 7 750 $ US par mois, un transfert à l’aéroport, un berceau et plusieurs cadeaux pour la mère. L’hôtel estime le coût total du forfait à 45 000 $ US. La plupart des mères restent deux mois. Elles font leurs propres arrangements médicaux aux coûts approximatifs de 30 000$ US.
En général, les clients de cet hôtel luxueux prennent en compte les avantages dont va bénéficier leur enfant en détenant la nationalité américaine: voyager librement, étudier et vivre, ainsi que faire venir les membres de sa famille aux États-Unis.
Toujours à New York, dans l’arrondissement de Queens, une femme tient une clinique de santé traditionnelle chinoise dans deux maisons où un pourcentage de sa clientèle son des femmes enceintes chinoises en provenance de l’étranger, rapporte la chaîne NBC en 2013. Elle a eu 150 clientes depuis l’ouverture de sa clinique et le prix d’une chambre varie entre 2 000 $ US et 5 000 $ US par mois, incluant les repas, le lavage et les soins pour le bébé. Les frais hospitaliers peuvent atteindre 10 000 $ US. Habituellement, les parents restent trois à quatre mois et dépensent un total de 30 000 $ US, incluant le billet d’avion.
La propriétaire d’origine chinoise peut pratiquer librement la technique traditionnelle « zuo yuei » aux États-Unis. Consciente de l’illégalité de son entreprise, elle a affirmé à la chaîne NBC que ses clientes participent à l’économie américaine lorsqu’elle les amène au centre d’achat et qu’elles achètent des marques luxueuses : Prada, Gucci, Dior et Coach.
Que la mère enceinte opte pour l’hôtel luxueux ou pour la clinique de santé relativement abordable, elle doit payer des frais hospitaliers. Selon l’organisme InterNations GmbH venant en aide aux gens qui déménagent aux États-Unis, sans une assurance médicale suffisante la mère doit débourser entre 10 000 $ US et 15 000 $ US. Ce montant ne couvre pas les divers traitements utilisés pendant les neuf mois précédant la naissance et les interventions en cas de complications pendant l’accouchement.
Si dans les trois cas les motivations sont différentes, les bébés nés à l’hôtel, à la clinique chinoise ou simplement en sol américain reçoivent en prime la nationalité américaine. Les États-Unis sont le seul pays, à l’exception du Canada, qui offre la citoyenneté automatiquement à la naissance en son sol. Le 14e amendement de la constitution américaine, ratifiée après la guerre civile, stipule que tous les esclaves libérés et leur descendance sont des citoyens américains, rapporte la chaîne NBC.
Le nombre de bébés nés aux États-Unis de parents qui voulaient que leur enfant ait la citoyenneté américaine se chiffre à 36 000 pour l’année 2015, d’après le Daily Mail du Royaume-Uni.
Accident
Vous êtes enceinte, mais l’accouchement est prévu dans quelques mois. Vous décidez donc d’aller passer une longue fin de semaine à New York, mieux encore vous séjournez une semaine dans les Caraïbes en faisant escale aux États-Unis. Soudain, vous accouchez de façon prématurée en sol américain. Vos assurances vous sauvent d’une facture salée et votre bébé reçoit en bonus la nationalité américaine. De retour à la maison, vous êtes loin de vous douter que l’avenir de votre enfant est hypothéqué.
Votre enfant va éventuellement figurer sur la liste des « US Persons ». Avec le Foreign Account Tax Compliance Act (Fatca), Washington exige des banques à travers le monde qu’elles lui fournissent la liste en question, sous peine de recevoir une amende de 30 % sur tous leurs flux financiers provenant des États-Unis, c’est-à-dire la plupart des transactions internationales s’effectuant en dollars US, transitant forcément par le sol américain. En fait, le Fatca vise les citoyens américains par naissance disposant de comptes qui dépassent au total 50 000 $ US.
La Suisse, la France et d’autres pays européens se sont conformés au Fatca, en signant une convention avec les États-Unis de non double imposition. L’Internal Revenue Service (IRS) applique les règles nationales à tous ses citoyens. Un citoyen avec la double nationalité, un Américain qui vit en France par exemple, n’est pas doublement imposé par les États-Unis et la France. Par contre, il doit faire une déclaration à l’IRS en vertu de la convention fiscale bilatérale de 1994. Si, selon la loi américaine, son impôt est plus important, il doit acquitter à l’IRS la différence entre ce qu’il a versé en France et ce qu’il aurait dû payer aux États-Unis.
Avec les mesures protectionnistes du président Donald Trump, les citoyens américains par défaut vont-ils être exemptés des frais estimés à 20 000 $ US pour renoncer à la nationalité américaine?
Le décret permettant de bloquer l’accès aux États-Unis aux citoyens de l’Iran, de la Libye, du Soudan, de la Somalie, de la Syrie et du Yémen au cours des 90 prochains jours, signé par le président américain le 28 janvier, s’avère être le pendant radical du Foreign Corrupt Practices Act (FCPA), une série de lois appliquées aux entreprises étrangères criminalisant en infligeant des amendes le commerce avec les États sous embargo américain, rapporte le Monde diplomatique.
Le nouveau président protectionniste va-t-il renoncer à ces amendes colossales?