Il serait faux de prétendre que les groupes Daft Punk et Justice ne se ressemblent pas. Tous deux formés de Français issus du même courant musical (la French Touch), tous deux de solides représentants du monde de la musique électronique, et tous deux embarqués dans un retour progressif aux sources de leur art. Quant à savoir s’il s’agit d’un bon choix, bien malin sera celui qui saura trancher.
Le duo Justice déboule avec son troisième album, Woman, fortement attendu après la parution d’Audio, Video, Disco, en 2011. Cinq ans, déjà! Et le moins que l’on puisse dire, c’est que Gaspard Augé et Xavier de Rosnay se sont laissés désirer. Quelques indices, ici et là, sur les pièces du nouvel opus. Trois extraits, Randy, Alakazam! et Safe and Sound qui tournent depuis quelques semaines. Mais rien de bien substantiel. Même la date officielle de sortie, ce vendredi 18 novembre, est demeurée incertaine jusqu’à la dernière minute.
Avec Woman, il est indéniable que le virage synthpop entamé lors du précédent album est bel et bien engagé. À l’image de Daft Punk, donc, qui est retourné aux sources avec Random Access Memory, leur plus récent disque, Justice en revient à ses origines. Non pas le disco des années Motown, comme leurs grands frères français, mais un peu plus tardivement dans l’histoire musicale, soit les années 1980 et tout ce qu’elles ont compté de couleurs pastel.
À bien y penser, ce recentrage musical n’est pas particulièrement surprenant. Déjà, quand Justice publiait des montages musicaux, dans la période de la sortie de Cross, leur premier album, les rythmes électroniques étaient entrecoupés de chansons pop françaises de cette époque. Et cela leur permettait d’ailleurs de se distinguer face aux autres artistes ne proposant que du boom boom.
D’ailleurs, Woman conserve certains aspects de la musique électronique qui a fait le succès de Cross. Alakazam, dont le vidéoclip monté à partir de séquences tournées lors d’une prestation du duo, évoque davantage le plancher de danse que les balades en voiture sur la Riviera française. Idem pour Heavy Metal, par exemple, bien que l’ironie soit assez flagrante: c’était bien Justice, après tout, qui concluait son premier disque live, A Cross The Universe, avec une séquence instrumentale de Master of Puppets, de Metallica…
En fait, Woman met la table. Mais dans quel but? Fort probablement offrir un troisième disque enregistré en concert. Les deux autres albums du groupe ont eu droit à ce traitement, et il serait étonnant que Woman y échappe. Les chansons se laissent volontiers écouter, même si on regrette l’aspect brouillon, agressif, voire presque sauvage de Cross.
Soyons honnêtes, en fait: les meilleurs albums de Justice sont justement ceux enregistrés en concert. Phantom: Part II, sur A Cross the Universe, est un délire électronique de 12 minutes. Et si le deuxième disque live, Access All Arenas, était globalement plus mesuré, le résultat était aussi plus assumé et plus agréable que le premier opus.
Bref, parions que les pièces de Woman ne prendront véritablement leur envol qu’en version spectacle. En attendant, le disque se prête volontiers à quelques écoutes en agréable compagnie.