Ils sont d’origine maghrébine. Ou moyen-orientale. Ils vivent en France. Ou en Belgique. Rachid et Mouloud, rescapés de la première fournée des Lettres arabes, remontent sur les planches de l’Espace Libre, le temps de jeter un pavé dans la mare socio-géopolitique.
Il y a quelque chose de jouissif à voir le nouveau directeur du Quat’Sous, Olivier Kemeid; le directeur artistique de l’Espace Libre, Geoffrey Gaquère, et l’auteur, metteur en scène et comédien Mani Soleymanlou à jouer l’Arabe moyen parlant en verlan et jouant les caïds à la petite semaine. Rachid et Mouloud, déménagés dans la commune à forte proportion musulmane de Molenbeek, dans la capitale belge, se retrouvent malgré eux dans un camp d’entraînement djihadiste en Afghanistan. De fil en aiguille, et sous l’égide d’un instructeur aux allures du sergent instructeur de Full Metal Jacket avec un turban sur la tête (Soleymanlou), ils se retrouveront au Canada en tant que réfugiés syriens. De l’Occident à l’Occident, en somme, avec moult gags acides et remises en question philosophiques au menu.
Véritable fusillade se voulant humoristique, Les lettres arabes 2 tirent sur tout ce qui bouge, en espérant faire mouche la majorité du temps. Des préjugés envers les intellectuelles dans la communauté musulmane en passant par les intégristes de l’État islamique, sans oublier la philosophie « câlinours » du gouvernement Trudeau et la xénophobie d’une partie de la société québécoise, les trois hommes n’oublient rien, mais cela ne veut pas dire que tout fonctionne. Multiplier ainsi les angles d’attaques pour trouver un terreau fertile pour le grand nombre de gags et les réflexions grinçantes réussit la majorité du temps, mais à l’image de la société d’accueil canadienne et québécoise, Les lettres arabes 2 se cherchent un peu.
Il était malgré tout savoureux de voir Mani Soleymanlou imiter la ministre canadienne du Patrimoine, Mélanie Jolie, qui incarne sans doute très bien à elle seule cette vision rose du monde selon laquelle quelques sourires et une tasse de « café » Tim Hortons permettent de bien s’intégrer au sein de la société canadienne.
Peut-être écrite rapidement pour profiter des plus récents développements dans l’actualité, Les lettres arabes 2 est une pièce efficace, mais qui manque quelque peu de finition. À voir malgré tout jusqu’au 19 novembre, entre les murs de l’Espace Libre.