Alexis Martin présente Sounjata, un conte folklorique malien du 27 septembre au 8 octobre.
Jusqu’à il y a une semaine, une semaine et demie environ, deux semaines au plus, ça augurait mal pour la nouvelle représentation du Nouveau Théâtre Expérimental ( NTE ). Chez Pieuvre.ca, nous avions reçu une invitation pour la première le 20 septembre. Après avoir réservé nos places, le NTE a annulé la représentation sans nous donner de nouvelles dates, prétextant que les artistes avaient été retenus aux douanes. Toujours choquant quand cela se produit; les danseurs mexicains de Zonabierta Escena Laboratorio avaient eu droit à la même « hospitalité » en 2015.
Un matin, je préparais ma cafetière pour me sortir des limbes du sommeil. Soudain, l’animateur Alain Gravel sur les ondes de Radio-Canada a annoncé son invité: Alexis Martin. Je me suis retourné vers l’émetteur me disant qu’on allait en savoir un peu plus sur le spectacle. Le metteur en scène a présenté Sounjata et annoncé les nouvelles dates. Après que l’animateur lui a demandé lequel de ses nombreux projets allait le rendre millionnaire, le dramaturge lui a répondu avec un certain inconfort: « ce n’est pas l’objectif! ». Mon café bouillait, j’ai retiré la cafetière.
En y repensant, l’arrêt aux douanes et la discorde lors d’une entrevue radiophonique constituent une excellente prémisse pour la nouvelle mouture du NTE. Comme si l’introduction à l’œuvre se faisait en dehors d’Espace Libre pour mieux laisser le champ libre pendant le spectacle au conteur originaire du Mali, pays du continent africain. Yaya Coulibaly, ses collègues marocains et québécois, ainsi que les marionnettes ne font pas qu’exporter une représentation préconçue. On cherche d’une part, une médiation avec la culture québécoise et d’autre part, une médiation avec le public.
Sacrifier un bœuf
La pièce commence avec l’arrivée d’agronomes québécois à Bamako. Si le couple ne s’est pas fait arrêter aux douanes, il se cogne le nez contre une autre conception de l’hospitalité rendu à leur hôtel. À ce moment, un dialogue interculturel s’installe sous la forme d’un poème épique que l’on peut associer aux récits homériques par sa largeur et sa subtilité. Chaque personnage prend part à la représentation que ce soit en manipulant les marionnettes ou en jouant des instruments de musique.
L’espace de médiation recherché que l’on peut imaginer comme une scène ou une ambiance, ou encore comme un morceau de l’Afrique après avoir traversé une série de longitudes et de latitudes pour se rendre jusqu’ici, se caractérise par l’oralité. Puis, cette culture qui ne se fonde pas sur l’écriture entretient des contes folkloriques créés selon les « règles » de l’oralité. Par exemple, le personnage de Soundiata Keïta devient « griot », c’est-à-dire la mémoire du village ou « la parole que l’on donne au temps ».
Par contre, comme l’oralité n’est pas fixée par l’écrit, chaque individu qui entre en scène sous le couvert d’un personnage peut décider de ne faire qu’à sa tête. D’ailleurs lors de la première, il y a eu un problème arrangé (ou non, suspense!) avec le gars des vues. On a arrêté le spectacle pendant un moment afin de trouver un terrain d’entente.
En espérant que le NTE ait réglé ses « conflits dramaturgiques », Sounjata est présenté à Espace Libre jusqu’au 8 octobre.
Photos: Pascale Gauthier-Dionne