Martin Prévost
C’est aux éditions Baker Street que vient de paraître le plus récent écrit de Robert Littell, déjà connu pour d’autres ouvrages sur la Russie ou l’Union soviétique. Publié d’abord sous le titre original The Mayakowsky tapes, il est traduit de l’anglais états-unien par Cécile Arnaud et prend en français le titre de Vladimir M.
Dans une écriture franche et sans détour, l’auteur nous présente la vie du poète Vladimir Vladimirovitch Maïakovski. En mettant en scène la rencontre improbable de quatre de ses muses qui choisissent de se réunir pour parler du grand poète disparu, Littell, crée une situation qui lui permet de jeter un regard un arrière sur la révolution bolchévique selon le point de vue d’un petit groupe d’artistes dont le grand Boris Pasternak et Maïakovski lui-même.
Au-delà du récit des quatre femmes, dont sera le témoin un jeune journaliste qui enregistre leurs propos, c’est un peuple soviétique désillusionné et ayant peur de tous (dénonciations et revirements dans les paranoïas de Iosef Staline lui-même) qui nous est dépeint ici. C’est à travers une série de petits épisodes de la vie du Poète et de ses muses que l’auteur nous décrit l’engouement puis le doute et enfin la déception et l’horreur qui ont été suscités par le projet de révolution bolchévique, et ensuite, par sa réalisation. C’est aussi la naissance et la gloire d’un grand artiste et d’un indécrottable coureur de jupons, qui va jusqu’à jouer à la roulette russe peut-être pour se rendre intéressant, qui nous sont narrés par quatre des anciennes maîtresses de l’illustrissime Maïakovski, Volodia pour les intimes.
Qu’on ne se laisse pas duper par le propos souvent léger, grivois, ou même vulgaire : Robert Littell ne fait pas dans le superficiel. Avec peu de mots et sans aucun fracas, Littell utilise le poids de l’histoire pour démontrer tout l’espoir que la révolution bolchévique a pu générer et toutes les horreurs qu’elle a pu engendrer. Malgré son propos historique sans mystère, ce roman se lit comme un polar et chaque page est tournée avec cette brève impatience qui prouve que le lecteur en redemande.