Imaginez un médicament sans effets secondaires ou mieux encore, un remède qui soigne plusieurs maux à la fois. Le docteur en biochimie et professeur-chercheur de la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université Sherbrooke Rafael Najmanovich s’attèle à rendre cet avenir possible.
« Il suffit parfois de changer un atome ou une liaison. Notre outil vise à aider ceux qui développent les médicaments pour empêcher les cibles croisées – responsables des effets secondaires », relève le biochimiste. Son outil bio-informatique (IsoMIF), constitué d’une banque de données des interactions entre molécules et protéines – plus de 7 000 protéines avec des structures connues et plus de 14 000 sites de liaison y figurent – propose six façons structurelles d’observer les liens qui se créent en présence des différentes molécules.
Cette méthode aide les chercheurs à mettre à jour les similarités de réactions des protéines – des réactions semblables autrement dit – pour que les concepteurs puissent modifier la formule des remèdes. « Les protéines sont comme des serrures et le médicament, la clé qui les fait réagir. Nous connaissons les protéines et leur réaction face à un type de médicament et en les comparant, nous pourrons développer des molécules plus ciblées ou en élaborer qui ciblent les deux en même temps », explique plus simplement l’étudiant au doctorat Matthieu Chartier.
Le développement de cet outil et son interface web pour la recherche ont déjà fait l’objet d’une, non de deux publications. Ils ont été en partie financés par le Consortium québécois sur le développement du médicament (CQDM), qui rassemble les plus grandes industries pharmaceutiques au pays.
L’outil, l’interface et les publications sont disponibles en open source afin que d’autres chercheurs puissent les utiliser gratuitement. « Nous tenons au transfert de technologie et au libre accès à notre travail, car notre financement provient du public et doit lui bénéficier », souligne le Pr Najmanovich.
Pharmacologie de précision
La médecine personnalisée, et plus particulièrement la pharmacologie de précision, serait l’avenir de la santé. Nos voisins américains ont même investi 215 millions de dollars dans l’Initiative sur la médecine de précision – comme l’expliquait notre collègue, Pascal Lapointe.
Pour contourner les limites de la création de nouveaux médicaments, les chercheurs pourraient replonger dans la pharmacopée existante et opérer un grand tri. Il serait également possible de développer des médicaments de prévention pour des maladies à venir, sans connaître l’inconfort de la prise de drogue.
« Prendre un médicament est souvent comme un couteau à double tranchant. Si nous pouvons initier une autre manière d’aborder la prise de médicament en réduisant la toxicité et en augmentant les cibles de réaction, cela réduirait les risques liés à la polypharmacie », assure le chercheur.