Bien conscient que « les troisièmes films sont souvent les pires », Bryan Singer ne prend aucune chance et se permet de piger dans tout (ou presque) de ce qui a le mieux fonctionné précédemment pour en doser le tir. Dommage toutefois que la cohésion n’égale pas la longueur de ce long-métrage qui fait grincer des dents plutôt que d’emplir excitation lors de ses 144 minutes plus ou moins mouvementées.
Après le mondialement acclamé, mais réellement stagnant et stupide Days of Future Past dont le scénariste Simon Kinberg était également responsable, on continue le saut dans le temps (en arrière) dans la trilogie plus ou moins directe démarrée lors du très satisfaisant reboot First Class, en se concentrant sur les années 1980. On suit directement les répercussions de la fin du volet précédent en montrant que la remise à zéro de la temporalité a eu ses hauts et ses bas alors que les personnages tentent du mieux qu’ils peuvent de se refaire une vie. Ce, tandis que le monde entier continue d’essayer de se faire à l’idée que des mutants côtoient notre quotidien.
Face à une année qui continue de nous noyer sous les films de superhéros, ce nouvel épisode de X-Men a le mérite de ne pas nous raconter la même histoire ou nécessairement de se concentrer sur les mêmes enjeux. De ce fait, ce nouveau X-Men se contente plutôt de rester enfermé dans son propre microcosme (même si elle essaie de représenter notre propre réalité de par ses références culturelles) pour répéter à l’usure ce qu’il nous raconte depuis maintenant plus de six films en ne tenant rien d’autre pour acquis. Du coup, la destruction du monde est à l’ordre du jour et les humains, les vrais, impuissants, ne font que subir pendant que les « héros » sont aux prises avec leurs propres démons intérieurs (que certains préféreront appeler profondeur narrative).
Ainsi, oui, il y a encore une dualité, la même opposant Magneto à Xavier, et pas vraiment de réflexion sur les ravages des mutants sur notre univers (ça, on doit le dire, la franchise a déjà une longueur d’avance en nous ayant fait le coup à de nombreuses reprises). Et, bien qu’il y a certainement plus d’action que dans le film précédent, expliquant la dose d’ennui moins grande, on doit admettre que l’histoire (sans pour autant mentionner les 10 000 autres sous-histoires qui se multiplient de par le nombre étouffant de personnages) qui le couvre est assez moindre pour attirer notre attention. C’est que le scénariste Kinberg est capable du meilleur et du pire. S’il a fait sourire avec ses Sherlock Holmes et Mr & Mrs Smith, on ne peut pas en dire autant de Fantastic Four (celui de l’an passé) et X-Men: The Last Stand (toujours considéré comme le pire de la série que tous les volets récents essaient d’ailleurs d’annuler par tous les moyens possibles).
Reste alors le lien de service qui vient tout unir en une seule situation: Apocalypse (qui n’a rien à voir avec sa représentation dans la scène cachée dans le générique de Days of Future Past), le premier mutant, sorte de Dieu puissant qui veut refaire la Terre, rien de moins. Dommage toutefois qu’encore là, on n’utilise pas cette opportunité pour développer quelque chose qui viendrait véritablement chambouler l’univers des X-Men et faire un film qu’on ne peut pas prévoir de son début à sa fin. En effet, les revirements sont loin d’être surprenants et, bien qu’on doit quand même s’en tenir un peu aux bandes dessinées et qu’on a ici un méchant d’une surprenante cruauté, on ne quitte jamais le chemin le plus fréquenté. D’ailleurs, on peut aisément trouver ce qui peut satisfaire ici et là pas mal tout le monde en multipliant cameos, clins d’œil, humour facile et moment plus touchant alors que le point d’orgue est surtout atteint lorsqu’on nous refait encore le coup de la scène « Quicksilver », quand le temps n’existe plus ou presque, dans quelque chose d’encore plus long, plus gros et relativement plus ambitieux, mais visuellement assez ennuyant, n’en déplaise au plaisir avoué de savourer en quasi-totalité la trépidante Sweet Dreams (are made of this) de Eurythmics.
De plus, si on fait usage d’une impressionnante distribution, on ne s’attarde décidément pas à en faire sortir le meilleur. Parlez-en à Oscar Isaac qu’on enfouit sous des tonnes et des tonnes de maquillage en l’empêchant complètement de cabotiner dans un rôle monotone cruellement retenu. À ce titre, c’est Michael Fassbender qui se retrouve avec la meilleure réplique « Who the fuck are you ? », ce qui n’est décidément pas normal.
Pour le reste, ils font du mieux qu’ils peuvent sans nécessairement de succès comme en témoigne Rose Byrne qui aura rarement semblé aussi confuse. Il en va de même pour Montréal où le tournage aura été effectué, qu’on cache ici sous des milliers de fonds verts alors que probablement la plus grande majorité du film s’avère être évacué de tout véritable lieu extérieur.
Reste alors une panoplie toujours aussi large de raccourcis scénaristiques (où le mutant au pouvoir nécessaire apparaît toujours au bon moment) et de symboles phalliques qui s’allient bien aux nombreuses références au viol que Apocalypse semble apporter à l’ensemble, prônant un désir particulièrement incestueux avec ceux qu’il appelle « ses enfants ». Peuvent en découler des rires involontaires nombreux, tout comme bien des tapes dans le front qui font regretter les productions qui n’ont pas peur de se donner quelques doses d’ambition (et non, l’utilisation de Beethoven dans une scène de guerre froide détournée n’en fait pas partie).
Voilà donc une commande de franchise qui devrait aisément satisfaire tous ceux déjà conquis, mais qui en aura que bien peu pour tous ceux qui ne peuvent plus tolérer l’arrive d’un nouvel opus. À cela, on comprend mieux Hugh Jackman dans son désir de vouloir littéralement prendre ses jambes à son cou alors que son contrat l’oblige néanmoins à se commettre encore, et encore, et encore..
Au moment d’écrire ses lignes, aucune scène post-générique ne se cachait durant le long-métrage. Il est pour l’instant impossible de savoir si la situation changera d’ici la sortie du film.
5/10
X-Men: Apocalypse prend l’affiche le vendredi 27 mai prochain. Plusieurs représentations spéciales auront lieu comme d’habitude la journée précédente.
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