Un film démontrant l’intolérable doit-il par défaut avoir le même effet sur son spectateur? C’est la question qu’on finit par se poser, complètement lassé par l’expérience étouffante que nous fait subir Mon Roi, la dernière proposition de Maïwenn qui s’est valu un prix d’interprétation à Cannes, une récompense qui ne manque certainement pas de faire sourciller.
Crier ne veut pas nécessairement dire talent et par moment il paraît qu’on a tendance à l’oublier. Néanmoins, dans ce croisement entre Force Majeure et Blue Valentine, tous deux évidemment supérieurs, en s’évitant de nommer trop de films qui touchent aux mêmes thèmes puisqu’on ne les compte plus, Mon Roi, avec beaucoup de prétention, s’amuse à s’immiscer dans un voyeurisme assumé dans le quotidien maladif de Tony qui se retrouve malgré elle éprise et prise de l’homme de sa vie qui est un manipulateur et salopard de la pire espèce.
Ce dernier a la fougue de Vincent Cassel, lui-même habité de juste ce qu’il faut de talent et d’ambiguïtés pour jouer les charmes et les manies d’un Casanova dangereux. Toutefois, au-delà de ce long deux heures, on fait des va-et-vient dans le temps pour nous faire comprendre les hauts et les bas de ce couple qui s’est jadis aimé, mais qui s’est aussi détruit, débutant par un accident et nous montrant en parallèle ce qui y a mené et comment notre protagoniste fait pour s’en remettre.
Certes, Maïwenn n’a jamais été la reine de la subtilité (l’amour blesse et fait mal) et elle joue souvent gros dans ses symbolismes (difficile d’oublier la finale « pitchée » de son néanmoins assez fascinant Polisse), mais au-delà de bribes de vie qui jouissent d’un naturel confondant, on aurait aimé beaucoup plus de profondeur dans ses réflexions qu’une succession abrutissante de répliques qui résument à gros traits les états d’âme et les situations des personnages. Après tout, lorsque le rire apparaît lorsqu’il ne devrait pas, il faut toujours se poser de fortes questions. On se demande encore d’ailleurs si on achète ou non la comparaison entre le genou et le je/nous.
Reste alors des performances dévouées (Emmanuelle Bercot fait tout ce qu’elle peut, surtout lorsqu’on lui demande de nous rejouer le coup de Marion Cotillard dans De rouille et d’os), par moment trop face au matériel qu’on leur a donné et beaucoup de scènes tantôt inutiles, tantôt ridicules, encore plus quand on se donne l’impression de s’intéresser à ce qui est davantage à caractère social (on parle un peu des cités et de ce qui différencie les différents quartiers de la France d’aujourd’hui). Ce qu’on sauve le plus au passage, c’est la présence non négligeable du toujours chaleureux et généreux Louis Garrel qui nous rejoue sa même rengaine, au même titre que Jérémie Elkaïm dans le film précédent de la cinéaste, mais qui apporte ce petit quelque chose qui apporte une couleur réconfortante à l’ensemble.
Pour le reste, au-delà de certains sujets qui ont quand même leur importance (la violence psychologique, la manipulation, la force de l’amour sur la raison, etc.), on regrette que le tout passe tout droit dans cette simili expérience cinématographique qui est trop occupée à regarder son propre nombril avant de s’assurer sur si ce que l’on fait vivre à son spectateur a oui ou non sa raison d’être.
4/10
Mon Roi prend l’affiche en salles ce vendredi 15 avril.