Ah, Frankenstein… ou plutôt son monstre, même si le second a tendance à prendre la place du premier dans l’imaginaire collectif. Aux pieds de l’oeuvre monumentale de Mary Shelley sont venus s’échouer quantité d’adaptations cinématographiques, et Victor Frankenstein, la dernière en date, ne fait hélas pas exception.
Réalisé par Paul McGuigan, scénarisé par Max Landis et sorti en 2015, le film mélange drame, film d’action et comédie, alors qu’un jeune docteur Frankenstein, interprété par James McAvoy (X-Men: First Class et Days of Future Past, etc.), s’adjoint les services de Daniel Radcliffe (Harry Potter, etc.) pour donner vie à un corps formé de diverses parties d’êtres humains.
L’histoire est plus que centenaire: l’homme joue à Dieu, s’arroge le droit de créer la vie à partir de la chair en décomposition et, ce faisant, donne « naissance » à un être tourmenté qui ne trouvera pas sa place au sein de la civilisation humaine, déclenchant par le fait même une réflexion philosophique sur ce qu’est le fait d’être un homme et la notion de puissance morale.
Point de ceci dans Viktor Frankenstein, ou si peu. Landis et McGuigan ont volontairement choisi de se concentrer sur les péripéties menant aux expériences du docteur et à sa rencontre avec celui qui deviendra son valet et assistant. Donnons-leur, sans grand problème, le bénéfice du doute. Après tout, l’histoire de Frankenstein et de son monstre est racontée sous une forme ou une autre depuis au moins 60 ans.
Au lieu d’une longue conversation philosophique et d’une montée en tension avec son lot de questions morales, on offre plutôt un film dont la formule ressemble étrangement à la série de films Sherlock Holmes mettant en vedette Robert Downey Jr et Jude Law. Époque similaire, décors surchargés typiques de l’idée moderne de l’Angleterre victorienne, et séquences d’action hyperactives. Et cela fonctionne… en partie. Sur le plan visuel, du moins, le film est un succès. Les décors sont surchargés, oui, mais le spectateur remarque surtout l’attention portée aux détails, la variété dans les accessoires, ou encore les effets de lumière. Le trop court plan où le coche des « gentils » se dirige vers le château où Frankenstein, et où la caméra semble placée par-dessus l’épaule droit du cheval, est tout simplement magnifique.
On excusera aussi les libertés du scénario par rapport à l’histoire originale. Le serviteur s’appelait Igor? Hop, le personnage de Radcliffe se fera appeler Igor après avoir été sauvé d’un cirque où on le maltraitait malgré son intérêt particulièrement marqué pour l’anatomie et la médecine. Le Igor du livre était un bossu? La bosse de Radcliffe est plutôt un abcès que Frankenstein drainera en un temps record. Ensuite, on installe un appareillage pour redresser le squelette et hop!, il n’y paraît plus.
Victor Frankenstein fonctionne momentanément comme substitut de moindre qualité à Sherlock Holmes (Downey Jr peut-il cesser de tourner dans d’insipides films associés aux Avengers pour reprendre le rôle?). Mais le spectateur a tôt fait de se rappeler qu’il peut tout simplement réécouter les deux films de la série Sherlock Holmes. D’autant plus que la confrontation finale avec le véritable monstre tient de la farce qui prend fin en cinq minutes. Un bien beau gâchis.