Mercredi, je me suis réveillée avec des images que je ne voulais plus voir; celle d’un assaut des forces de l’ordre françaises, à Saint-Denis, juste aux portes de ma ville, juste aux portes de Paris.
Six jours seulement nous séparent de ce vendredi d’horreur et je n’arrive toujours pas à réaliser. Je n’y étais pas, mes proches n’y étaient pas, mais ces morts auraient pu être ma sœur, mon meilleur ami, mes collègues. Bien sûr je connais des rescapés du Bataclan, comme une large partie de mes amis, bien sûr j’ai vu dans mes relations Twitter des personnes chercher des proches, toutefois je ne réalise pas.
Pourtant, les chaînes d’info sont bien là pour nous rappeler ce qui est arrivé. En boucle, à décrypter les images, s’avancer sur certaines informations non confirmées, diffuser des portraits de terroristes… Mais les pires ce sont les réseaux sociaux : leurs fausses alertes, leurs rumeurs, leurs photos macabres. Je sais que je n’y trouverai rien de bon et néanmoins je passe mes journées devant : je suis victime d’une boulimie médiatique.
Lundi, j’ai rejoint la Place de la République, si chère à l’esprit du 11 janvier, et y ai retrouvé une foule silencieuse, abasourdie devant toutes ses bougies, fleurs et dessins. Je me suis dit que malgré les interdictions, malgré la peur, nous étions là, prêts à rendre hommage et à être unis.
Malheureusement, ce sentiment m’a rapidement quitté. Je suis écœurée de voir la façon dont les politiques réagissent, l’irrespect, les critiques faciles, ces putains d’égos mal placés. Cependant, ce qui me fait le plus de mal est de me rendre compte que j’ai peur. Mon attention est captée par chaque sirène de police ou d’ambulance qui vient de la rue. J’ai l’impression qu’elles sont bien plus nombreuses qu’avant. Vont-elles être quotidiennes ? Vais-je devoir m’habituer à vivre avec ? J’ai peur et je sais que je ne devrais pas. J’ai peur pour mes proches, qui vivent dans le XVIIIe (arrondissement cité dans le communiqué de DAESH comme cible), qui travaillent à la Défense ou dans les grands magasins parisiens (sites jugés sensibles aux attaques). Ce soir je dois fêter un anniversaire au cœur de Paris et je n’irai pas avec la même sérénité qu’avant. J’ai peur, mais je ne dois pas avoir peur. Je dois continuer à vivre, pour tous ceux qui sont morts, à sortir, à aimer. C’est le message de tous les Français et je veux le suivre, car je sais que nous nous en sortirons et que nous les aurons. Mais en attendant : j’ai peur.