Le plus récent opus de Lise Tremblay, récipiendaire du Prix du Gouverneur général en 1999, est un récit qui a tout du chemin de croix et un peu du combat entre le bien et la mal. Le bien étant personnifié par le Chemin St-Paul, du côté de chez son père, et le mal par la maison en bardeaux, du côté de chez sa mère et de sa grand-mère.
Point de suspense, bien sûr, dans ce récit, mais beaucoup de sentiment et de ressentiment. Dans un style affirmé et fluide, l’auteur raconte la folie dans la famille de sa mère et les nombreux impacts de cette folie sur toute une lignée. De toute la douceur venue de son père, on comprend qu’elle n’a pas suffi à endiguer le flot de crainte et de colère généré par plusieurs générations de peur, de dérèglements psychologiques et de violence. D’aimer si fort son père, n’empêche pas de détester sa mère. Une mère qui a d’ailleurs la mauvaise idée de survivre à son mari.
Tout ce désarroi, toute cette terreur, ont fait de Lise Tremblay, une exilée et une auteure. Pour elle, le retour au pays et la vie heureuse sont incompatibles. Il lui faut fuir le lieu de son malheur.
Quand on lit Lise Tremblay, on se met à sa place, on se sent à sa place. Pas de détours, pas de faux fuyants, pas de tabous : on utilise les vrais mots pour dire les vrais choses et ça fait mouche. Chemin St-Paul, c’est une thérapie publique sans être un étalage impudique. Le choix de ce titre plutôt que celui de La maison en bardeaux, c’est une lueur d’espoir. C’est le refus d’abdiquer devant la terreur, devant la violence et l’inéluctable.
Chemin St-Paul, paru tout récemment chez Boréal dans la collection Récit, ne fait qu’une courte centaine de pages mais rien n’y manque et rien n’y est de trop.