L’opéra Nelligan présente l’histoire de l’auteur des célèbres vers du début du siècle «Ah ! comme la neige a neigé ! Ma vitre est un jardin de givre», vers qui semblent d’autant plus lointains en ce beau début de printemps.
L’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal en collaboration avec l’École nationale de théâtre du Canada présentait l’opéra Nelligan au Monument-National du 6 au 13 mars 2010.
L’histoire du jeune homme, très fortement influencé dans son précoce cheminement de poète par Verlaine et Baudelaire, est présentée ici de façon romantique mais surtout tragique. Dès le début de l’opéra la graine de la folie est plantée dans le personnage d’Émile en mise en abyme et le suit tout au long des 14 scènes.
L’omniprésence de la menace d’internement à l’asile, ainsi que l’incompréhension de ses proches, couplée au décor dénudé aux teints de noirs et de blancs, créés une ambiance très sombre à cette pièce biographique.
La vie d’Émile est présentée comme un combat de touts instants entrecoupée de très éphémères moments de clarté et de bonheur, notamment avec sa jeune sœur et son ami Arthur de Bussières. Tout à leur honneur, les acteurs ont cependant su garder le rythme et l’émotion au plus fort tout au long des deux actes de cet opéra.
Le livret original, écrit en vers libres par Michel Tremblay, insiste sur les sentiments des proches de Nelligan, alors qu’il démontre non seulement des qualités artistiques mais aussi des penchants pour l’isolement et la folie. Cette folie qu’il est difficile de qualifier comme tel près de cent ans plus tard, mais qui au début du siècle fut diagnostiquée comme émanent de psychoses graves. On peut se demander s’il était tout simplement incompris de ses proches, dans son parcours artistique et dans sa personnalité excentrique.
Ses quarante années d’internement semblent très drastiques et on regrette tous les poèmes qui n’ont jamais été écrit et la carrière qui s’est abruptement terminée au début de ses vingt ans.
Cet opéra tourne autour de thèmes encore d’actualité avec le jeune homme tiraillé entre la culture francophone de sa mère et celle anglophone de son père, la question de l’influence de la critique et celle de l’incompréhension de la vie d’artiste.
Cette présentation a été faite dans le cadre des 25 ans de l’atelier lyrique et du 20e anniversaire de l’opéra Nelligan, qui était présenté pour la première fois au Grand théâtre de Québec en 1990.