Christine Plante
Le flamenco est souvent bien ancré dans ses traditions. Issu de l’Espagne du sud, l’Andalousie a cependant ouvert son esprit et son essence à l’ensemble Constantinople, qui revisite ses racines, ravive son esprit, et qui s’impose sans compromis comme une relecture inédite de ses sonorités jusqu’ici bien établies.
Constantinople, c’est avant tout l’art de la musique ancienne. Depuis près de sept ans, les trois artistes qui lui donnent son ton pincent les cordes d’instruments d’autres époques et d’autres cultures. Et Constantinople s’est posé à Montréal, sur les planches de la salle Pierre-Mercure du centre Pierre-Péladeau, l’espace d’une soirée Caliente!
Du flamenco, on s’attendait à la danse rythmée, à la guitare, au chant lourd. On a eu droit à un tout autre univers. Cinq chaises ont accueilli tour à tour la voix authentique de Rosario La Tremendita, qu’on sentait légère et naturelle, vraie, en pleine possession de ses moyens d’expression. Originaire du berceau du gitan espagnol, le quartier Triana à Séville, elle est tombée dans le flamenco quand elle était toute petite, et a poussé jusqu’à devenir l’une des grandes artistes de son art aujourd’hui maîtrisé. On a aussi entendu des percussions, des cordes d’hier et d’aujourd’hui : viole de gambe, ce violoncelle moyenâgeux au son unique, le setâr, qui a clôturé le spectacle, et finalement la guitare flamenca, qui servait à nous rappeler à l’ordre quand on se sentait tranquillement glisser vers des territoires émergents issus de ce métissage aux limites incertaines.
Parce que c’est véritablement une opération de défrichage culturel que nous propose Constantinople. Une exploration des possibilités inouïes qui peuvent naître lorsque des artistes accomplis s’assoient ensemble, et grattent les cordes de leur répertoire. On partait du passé, et on se surprend à regarder plutôt vers l’avenir.
L’avenir, comme dans Premiers Songes, prochain spectacle de la troupe, explorant cette fois la musique mexicaine baroque, le 25 mars, et dans Vous avez dit Klezmer?, où il sera plutôt question de yiddish et de perse, le 19 mai.