Soir de première, hier, au Théâtre du Nouveau Monde; première du Bourgeois Gentilhomme, certes, mais également première mise en scène de Benoit Brière, avec Guy Jodoin dans le rôle principal. Ce classique de Molière est au final brillamment revisité, drôle et ô combien toujours aussi pertinent aujourd’hui.
Monsieur Jourdain est-il un arriviste? Le terme semble être on ne peut mieux choisi, lui qui tente désespérément d’accéder au statut de la noblesse, malgré son état de riche vendeur de drap. Prêt à tous les sacrifices – et à tous les ridicules – pour atteindre ce but, il se fera abuser autant par les uns que par les autres. Difficile de ne pas trouver, autour de soi, de tels exemples d’opportunistes et de faux-intellectuels aujourd’hui, même si plusieurs siècles se sont écoulés depuis que Molière a terminé la rédaction de ce ballet.
Ballet, oui, il faut le dire, car si le metteur en scène Benoît Brière a opté pour un décor clinquant, associant avec brio les surfaces de verre et de métal poli à une architecture résolument XVIIe et XVIIIe siècles, il a également choisi de préserver certaines scènes de danse et de musique, ainsi que de demeurer dans le texte d’époque.
Guy Jodoin étonne par sa maîtrise du personnage. Certains de ses précédents rôles l’ont peut-être aidé à mieux saisir toute l’absurdité et la pédanterie de Monsieur Jourdain, mais il n’en reste pas moins que l’acteur semble à l’aise du début à la fin. Plus que cela, il fait le pitre avec un naturel qui mystifie.
Les autres comédiens ne sont pas non plus en reste; on a d’ailleurs droit à une belle brochette de talents fort connus de la scène et du petit écran québécois. Sylvie Léonard, par exemple, est majestueuse en inatteignable Dorimène, tandis que Denis Mercier excelle dans le rôle de Dorante, le comte sans le sou qui manipule effrontément Monsieur Jourdain pour lui soutirer ses deniers. Mention particulière à Monique Spaziani et à Nathalie Mallette, respectivement Madame Jourdain et Nicole la bonne, qui développent sur scène une complicité et une complémentarité sans faille.
Seule ombre au tableau, quelques gags du début de la pièce tombent à plat. Est-ce le texte qui est à blâmer? Certains facéties ont laissé le journaliste de marbre.
Malgré tout, Le Bourgeois Gentilhomme est un petit bijou, et l’adaptation qu’en a fait Brière tient fidèlement la route d’un bout à l’autre. Chapeau.