Le Festival du Nouveau Cinéma présentait un trio de films cet après-midi à l’Ex-Centris; deux documentaires, The Solitary Life of Cranes, Naïade et Petropolis. Deux documentaires tenant d’avantage de l’essai, ainsi qu’un court-métrage de dessins animés. Critique.
L’art du documentaire possède son ensemble de codes, tout comme la comédie, le film d’amour ou le long-métrage d’action. Quand des cinéastes tentent de quelque peu transcender ces règles non-écrites, le résultat est parfois heureux, parfois malheureux. Dans le cas des films présentés à l’Ex-Centris, il ne s’agit pas ici d’un constat d’échec, mais pas d’une réussite non plus.
Le premier documentaire, The Solitary Life of Cranes, réalisé par Eva Webber, explore la vie des grutiers, ceux qui font fonctionner ces géants métalliques surplombant la ville. La métropole londonienne est utilisée ici comme exemple, mais les considérations sont certainement les mêmes pour tous les opérateurs de ces monstres mécaniques, qu’ils soient à Dakar, Moscou ou Montréal.
Perchés dans les airs, ces hommes solitaires en viennent à voir la vie autrement, disposant d’un point de vue sur la société radicalement différent des passants et des habitants « d’en-bas ». De machinistes, ils deviennent philosophes, penseurs, voyeurs, rêveurs.
L’exercice tient d’ailleurs davantage du film d’essai que du véritable documentaire. Aucun fait, que des témoignages de grutiers – parfois inintelligibles, d’ailleurs, accent britannique très prononcé oblige, et une musique new age embêtante. Certains plans sont trop longs, et on finit malheureusement par être gagné par le sommeil à mi-chemin de la projection. Le film dure 27 minutes uniquement, c’est dire!
The Solitary Life of Cranes explore malgré tout de façon intéressante un sujet négligé, mais aurait gagné à être davantage dynamique.
Naïade, quant à lui, est un superbe court-métrage d’animation unifiant les techniques d’utilisation de marionnettes à fils aux effets spéciaux provenant de diverses méthodes. Le tout couplé à une bande sonore poignante et diablement efficace nous plonge tête la première dans l’histoire d’une jeune fille se battant pour conserver vivante une forêt et un marécage contre un étrange garçon aux sombres visées. Réalisé par Nadia Micault et Lorenzo Nanni, Naïade est un petit bijou de film.
Petropolis, enfin, pièce de résistance de ce triumvirat cinématographique, est un docu-reportage produit par Greenpeace Canada concernant l’exploitation des sables bitumineux albertains. Étrangement, le réalisateur, Peter Mettler, a uniquement misé sur la force de l’image pour faire passer son message. Territoires dévastés, étendues polluées, souillées, éventrées, nappes de pollution s’étendant à perte de vue, le constat visuel de l’exploitation du pétrole dans cette région frappe durement. Ces camions-bennes géants, chacun grand comme une maison, qui gisent éparpillés sur un chemin, semblent minuscules comparés au terrain alentour. Terrain, d’ailleurs, qui semble sortir tout droit d’un film de science-fiction.
Le film échoue cependant à toucher autant qu’un documentaire « traditionnel »: pas d’experts appelés à témoigner, pas de constat, pas de narration (ou presque)… Les images sont choquantes, terrifiantes, mais ne heurtent pas autant les sensibilités qu’une voix narrant des statistiques de pollution aurait pu le faire.
On retiendra donc de Petropolis que c’est un film marquant au niveau de la photographie, mais peu efficace au niveau de la conscientisation écologique.