Le désert, pièce écrite par Olivier Sylvestre, nous plonge dans un univers de poésie où la dépendance se situe au centre de l’oeuvre. Avec une mise en scène intimiste, dans la petite salle du Théâtre Prospero, le comédien et metteur en scène Frédéric Sasseville-Painchaud nous livre un témoignage poignant d’un homme en état de manque faisant face à ses démons.
Encore une fois, nous ne pouvons nier le talent d’écrivain d’Olivier Sylvestre. Lorsque nous croyons à une simple histoire de rupture amoureuse, la subtilité de l’auteur nous amène complètement ailleurs. La dépendance affective se transforme en dépendance aux drogues. Un homme, affrontant une chaleur insupportable, celle du sevrage, te fait part de ses rêves la nuit, du trou dans son ventre et du vide que cela cause en lui. En s’adressant directement aux spectateurs, l’homme nous introduit dans son esprit où le désir de se sentir vivant devient plus fort que tout. À la recherche de l’excitation et sensation de la première fois, il passe d’une dépendance à une autre pour retrouver ce plaisir intense qu’est la nouveauté. Retrouver ce sentiment d’évasion totale. Sans jamais nommer le problème, l’auteur nous offre assez de pistes pour comprendre que l’homme, ancien toxicomane, frôle la rechute.
Dotée d’une démarche artistique méticuleuse et audacieuse, la pièce tente de nous projeter dans un univers à la fois épuré et mystérieux, entre froid et chaleur, sans toutefois parvenir à atteindre leur objectif. La première partie du texte est transmise par voix hors champ. Au moment où cette partie commence à se faire trop longue et que l’idée de la solution facile devient quasi évidente, l’acteur prend enfin la parole. On finit par comprendre que, comme le texte, la mise en scène évolue progressivement. L’interprète prend vie et nous révèle enfin son talent.
Frédéric Sasseville-Painchaud a laissé complètement place au texte. Entre la performance et le spoken word, il nous livre un monologue intérieur bouleversant. Il amène le spectateur à une plongée intime au centre d’une relation toxique ou le remède utopique de son mal-être devient l’Autre. Dans cette relation, l’homme est parvenu à trouver sa bouée de sauvetage. Mais plus le temps passe, plus il sent la résistance s’achever. L’excitation du corps de l’autre ne suffit plus. Il confronte, donc, le froid pour assouvir ses envies. Frédéric Sasseville-Painchaud nous propose un jeu corporel à la fois intense, mais souvent en retenue. À ne pas confondre avec une chorégraphie, mais plutôt à un état du corps en soi.
Olivier Sylvestre détient d’un baccalauréat en criminologie et d’un diplôme d’écriture dramatique de l’École nationale de théâtre du Canada. Auteur et traducteur, sa première pièce, La beauté du monde, a gagné le prix Gratien-Gélinas et a été finaliste aux Prix littéraires du Gouverneur général. Il s’emploie comme intervenant en dépendance à Montréal depuis 2006. En 2015, il a fondé la compagnie Le Dôme– créations théâtrales, avec l’auteure Nathalie Boisvert et le metteur en scène Frédéric Sasseville-Painchaud. Il s’agit du troisième spectacle de la compagnie.
Vous pouvez voir Le Désert jusqu’au 3 février dans la Salle intime du Théâtre Prospero.
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