L’esprit vif, le regard rieur et un sens de la répartie toujours aussi aiguisé: à bientôt 75 ans, Terry Mosher fait toujours honneur à la légende montréalaise qu’il a bâtie au cours de ses 45 dernières années au Montreal Gazette.
Caricaturiste-vedette du quotidien mieux connu sous le surnom d’Aislin, il a ausculté la société québécoise comme peu ont eu le courage de le faire, s’attirant les rires de certains politiciens et les insultes de quelques autres. Apparemment, Paul Martin aurait payé une petite fortune pour des croquis originaux, et notre « nouveau shérif en ville », le maire Denis Coderre, apprécierait peu sa ressemblance avec Fred Flintstone…
Dans le cadre de l’exposition présentée au Musée McCord du 5 avril au 13 août 2017, Mosher, en collaboration avec le conservateur Christian Vachon, a choisi 50 de ses esquisses les plus symboliques, une pour chaque année de sa carrière longue d’un demi-siècle. Il s’agit ici d’une formidable occasion pour notre côté des deux solitudes québécoises de voir le point de vue de nos voisins.
Car malgré les rapprochements évidents effectués au cours des dernières décennies, l’humour anglophone et francophone sont différents dans le ton, les sujets, ce qui est comique ou pas, etc. Montréal est un melting-pot fascinant, « une source intarissable d’inspiration, je n’en n’ai jamais manqué! » révèle Mosher. Il a également profité de l’occasion pour rendre hommage à son collègue francophone Chapleau, « un être extrêmement brillant et talentueux ».
L’exposition est séparée en cinq sections thématiques. Une société en changement illustre les bouleversements vécus par la société québécoise dans les années 60, avec entre autres une illustration de Leonard Cohen. Politique québécoise et canadienne aborde la question de l’élection du Parti Québécois, l’adoption de la loi 101, etc., tandis que Maires de Montréal constitue une galerie de portraits des élus municipaux. On retrouve la fameuse satire de Pauline Marois version Wrecking Ball de Miley Cyrus du côté des premiers ministres, et, peut-être le volet le plus sensible de toute la collection, Vie montréalaise. Membre du conseil d’administration de la Mission Old Brewery, il se permet tout de même quelques blagues sur l’itinérance.
Car la caricature peut se permettre, par son côté absurde et arrogant, de rire de tout, et quelle merveilleuse thérapie collective, tout de même! Même s’il est permis d’en douter avec la tragédie de Charlie Hebdo et autres offenses faîtes à la liberté d’expression dans les dernières années, cette exposition est une bonne occasion pour nous rappeler que le rire transcende les tabous, que même le premier ministre peut avoir un gros nez, qu’une caricature peut sembler dure et cruelle sur le coup, mais qu’elle est là pour nous rappeler que rien ni personne n’est intouchable, en fait.
Et que, comme le rappelait Aislin, « un peuple qui sait rire de lui-même est peut-être quelque chose comme un grand peuple. »
La rétrospective marque également la sortie du dernier livre de Terry Mosher: From Trudeau to Trudeau- Aislin-Fifty years of Cartooning, en vente bientôt.
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